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vendredi 28 janvier 2022

Le cœur battant de nos mères - Brit Bennett

 Par Daphné








Auteur :  Brit Bennett
Titre : Le cœur battant de nos mères
Genre : roman
Langue d’origine : anglais (Etats-Unis)
Traductrice : Karine Lalechère
Editeur : Autrement
Nombre de pages : 370

Date de parution : 2017

Résumé de l'éditeur:

Quand Nadia, 17 ans, perd sa mère et avorte en cachette, sa vie est bouleversée. Elle choisit alors de quitter la communauté noire et religieuse qui l’a vue grandir et laisse derrière elle Luke, son amant aux rêves brisés, et Aubrey, sa meilleure amie. Boursière dans une grande université, Nadia fréquente désormais l’élite.
Durant une décennie marquée des affres de la vie, les trajectoires des trois jeunes gens.
 

Mon avis :

J'avais beaucoup aimé L'autre moitié de soi de Brit Bennett aussi avais-je hâte de découvrir son premier roman. J'ai cependant  beaucoup moins "accroché" bien qu'ayant tout de même passé un bon moment de lecture. 

A 17 ans, Nadia vient de perdre sa mère et se retrouve enceinte de Luke, le fils du pasteur. Après avoir avorté, elle devient amie avec Aubrey, une jeune fille de son âge arrivant tout juste dans la communauté protestante du père de Luke. Pendant des années, Luke, Nadia et Aubrey, trois personnages cabossés par la vie,  vont voir plusieurs fois leurs chemins se séparer et se croiser de nouveau. 

J'ai bien aimé la manière originale dont ce roman nous est conté, par un chœur de femmes, les femmes âgées de la communauté qui observent les trois personnages principaux dont elles nous narrent l'histoire et les blessures. 

L'histoire se lit facilement, les thèmes abordés sont finement explorés mais il m'a cependant manqué un petit quelque chose pour véritablement apprécier ce roman. Peut-être en attendais je trop après avoir tellement aimé L'autre moitié de soi  lu peu de temps auparavant.

Extrait :

"Oh oui, ma petite, nous avions un peu connu l'amour. Ce reste de miel au fond d'un bocal qui emprisonne ce goût sucré dans votre bouche, assez longtemps pour masquer la faim. Nous avions promené nos langues sur nos dents pour le savourer le plus longtemps possible, et dans toute notre existence rien ne pus a affamées davantage."

mercredi 26 janvier 2022

Mercredi, c'est le jour des petits - Des nouvelles de mon chat - Gilles Bachelet

 Par Daphné









Auteur  : Gilles Bachelet

Titre Des nouvelles de mon chat 
Editeur :Seuil Jeunesse


Résumé de l'éditeur :

L'appartement de l'auteur étant devenu trop petit pour son chat devenu trop gros, ils partent tous deux s'installer à la campagne. Une véritable révélation pour l'animal le plus bête du monde, devant tant d'espace à explorer, tant de nouveaux jeux à découvrir ...

Mon avis :

A huit ans, ma fille délaisse de plus en plus les albums pour se tourner vers les romans ou les bandes dessinées. Mais les albums de Gilles Bachelet, eux, ne sont jamais délaissés et elle emprunte en boucle tous ceux qu'elle peut trouver à la médiathèque. Celui-ci fait suite à Mon chat le plus bête du monde . Si vous ne connaissez pas le chat de Gilles Bachelet, sans doute faut-il vous prévenir : c'est un chat un peu spécial, doté d'une trompe, de défenses mais aux attitudes très félines! Dans cet album, le chat, son inséparable doudou carotte et son auteur, déménagent à la campagne. Et voilà notre chat qui y fait une belle rencontre et tombe amoureux d'une chatte qui, elle, a bien des griffes et des moustaches comme tout chat qui se respecte! 

Si vous avez, comme ma fille, un humour très visuel et un bon sens de l'observation, alors cet album est fait pour vous. Le texte et les images sont en décalage total, et l'éléphant avec ses mimiques et ses jeux aurait tout du vrai chat.... à part son corps d'éléphant bien sûr, et essayez donc de vous comporter comme un chat avec un corps d'éléphant! 

Gilles Bachelet manie ici l'absurde avec une telle finesse qu'on en redemande! Chez nous, on l'aime beaucoup ce chat pas tout à fait comme les autres!





mardi 25 janvier 2022

Les métamorphoses - Camille Brunel

Par Ariane


Auteur : Camille Brunel

Titre : Les métamorphoses

Genre : roman

Langue d’origine : français

Editeur : Alma éditions

Nombre de pages : 195p

Date de parution : août 2020

 

Mon avis :

Deux œuvres littéraires majeures portent le titre de métamorphoses. Il y a celles d’Ovide et celle de Kafka. Les premières regroupent les récits de métamorphoses de la mythologie grecque. Pour les punir, parfois pour les sauver, des dieux métamorphosent des humains en animal ou en végétal. Dans la seconde, un homme se réveille un matin métamorphosé en cafard. C’est le début d’une histoire incroyable, prétexte à une critique sociale. Camille Brunel nous propose à son tour une singulière histoire de métamorphoses.

Un matin, une jeune femme aperçoit dans son jardin, un étrange oiseau. De longues pattes, un corps élancé, un cou gracile, un long bec  et la face rouge. Intriguée elle poste une photo sur les réseaux sociaux et quelques heures plus tard, la réponse : c’est une grue Antigone. Que fait-elle là ? Comment est-elle arrivée ici ? Nul ne le sait. L’histoire pourrait n’être qu’une anecdote surprenante, si d’autres animaux n’apparaissaient pas là où ils n’auraient pas dû être. Et tandis que des animaux apparaissent, des humains disparaissent…

Je ne l’ai pas présenté ici, mais j’ai participé sur Instagramm au jeu de l’Avent littéraire. A chaque jour, une catégorie et un titre. J’ai eu envie de citer ce livre de Camille Brunel à plusieurs reprises. J’aurais pu le citer pour « le livre qui a fait particulièrement écho en moi », « le livre le plus engagé », « le livre le plus déstabilisant » ou « le livre le plus poétique ». Mais c’est finalement pour la catégorie « le livre qui m’a inspiré des émotions extrêmes » que j’ai choisi de le citer.

Des émotions extrêmes, c’est exactement ça. Il y a eu l’émerveillement à imaginer des animaux libres et vivants au milieu des humains, la réjouissance à l’idée d’une nature qui reprend ses droits, l’éblouissement devant la beauté de l’écriture. Mais progressivement, l’inquiétude s’est installée. Les frontières entre humanité et animalité sont balayées, les sociétés et les relations humaines sont bouleversées par des transformations chaque jour plus nombreuses et parfois tragiques. On bascule progressivement dans un récit apocalyptique tendu et effrayant, mais toujours porté par cette écriture sublime qui donne aux descriptions les plus terribles une beauté tragique, voire parfois un comique tragique. Et lorsque l’angoisse est à son comble, l’auteur a la bonté de nous offrir une scène finale, d’une poésie et d’une sérénité bouleversantes.

Lorsque l’on parle des émotions et de l’intelligence animale, on est parfois accusé d’anthropomorphisme. Alors Camille Brunel prend le contrepied et décide de transformer les humains en animaux, pour nous inciter à réfléchir aux rapports que nous entretenons avec eux. Si l’être humain accorde aux animaux le statut d’être vivant, il leur refuse celui d’être. Asservi à l’espèce humaine, source de nourriture, de compagnie ou de distraction, l’animal est une bête, dont la vie ne vaut pas grand-chose si ce n’est celle que les humains veulent bien lui accorder.

Lorsque j’ai refermé ce roman, j’étais dans le train pour Paris, en route pour la rencontre organisée par l’équipe des 68 premières fois. Rencontre où était invité Camille Brunel. J’ai eu l’occasion de lui parler quelques minutes, mais je n’aurais pas su lui dire à quel point la lecture de son livre m’avait bouleversée, bousculée, métamorphosée peut-être… Plusieurs mois après, les émotions sont toujours aussi fortes. Entre émerveillement et terreur… et espoir qu’un jour, l’équilibre soit rétabli, sans en arriver à une disparition de l’espèce humaine.

 

lundi 24 janvier 2022

Pourquoi les bébés dorment-ils dans des lits à barreaux ? - Natacha Butzbach

 Par Daphné








Auteur : Natacha Butzbach
 Titre : Pourquoi les bébés dorment-ils dans des lits à barreaux ?

 Genre : essai
 Langue d’origine : Français
 Editeur : Myriadis
 Nombre de pages : 102
 Date de parution : 2021

Résumé de l'éditeur :

Pourquoi les bébés dorment-ils dans des lits à barreaux ? La question peut sembler incongrue. Où voudriez-vous qu’ils dorment sinon, serait-on tenté de répondre. Pourtant, dans d’autres cultures, les bébés dorment près de leurs parents voire sur eux, maintenus dans un porte-bébé ! La façon dont dorment les bébés et, plus généralement, la façon dont on s’en occupe n’est pas universelle et en dit long sur les croyances d’une société donnée, sa conception de l’enfance, de l’humain, de la vie. Qu’est-ce qui explique, alors, les importants écarts entre les populations humaines dans la façon de prendre soin des petits ? Pourquoi les femmes occidentales n’allaitent-elles pas, ou peu ? Pourquoi le bébé occidental est-il mis à distance de ses parents, dans un lit séparé, dans une poussette, chez une nourrice ? Pourquoi le laisse-t-on pleurer plutôt que de le consoler sans délai ? D’où provient cette réserve, propre au monde occidentalisé, vis-à-vis des modes de maternage qui impliquent une grande proximité physique entre parents et enfants ? Dans ce petit essai, la psychologue Natacha Butzbach propose une revue historique des pratiques puériculturelles occidentales, de l’Antiquité à nos jours, pour en exhiber les racines. Cette analyse des fondements des cultures de non-allaitement et de la distance parentale se présente, dans le même temps, comme un plaidoyer, solidement argumenté, en faveur du parentage proximal et de pratiques parentales plus respectueuses des besoins des enfants.

Mon avis :

J'aime beaucoup les livres qui traitent des coutumes envers les bébés selon les différentes cultures. Ici, l'autrice s'intéresse aux bébés occidentaux. Elle se questionne sur les raisons qui ont poussés les parents de notre culture à s'éloigner de leurs bébés notamment par le biais d'objets de puériculture (dont les lits à barreaux come l'indique le titre). Pourquoi dorment-ils séparés de leurs parents et pourquoi le cododo est il si mal vu alors qu'il est pratique courante dans la plupart des pays de la planète ? Pourquoi dans notre société est il impensable d'emmener ses enfants au travail alors que c'est le cas ailleurs? Pourquoi les mères ne parviennent-elles ou ne veulent-elles plus allaiter? Pour répondre à ces questions, Natacha Butzbach remonte le temps, nous parlant de la manière dont on s'occupait des bébés pendant du Néolithique jusqu'à nos jours. 

Il en résulte un ouvrage particulièrement intéressant, uns vraie mine d'informations. Savez-vous par exemple à partir de quelle époque et pourquoi le berceau a t-il pris place dans les habitations ? Sous quels critères étaient choisies les nourrices et qu'elles étaient la plupart du temps obligées d'abandonner leurs propres enfants pour nourrir ceux des autres ? 

Après ce rappel historique, l 'autrice s'intéresse également à la manière dont nous considérons les enfants actuellement dans notre société et milite en faveur du maternage proximal. Ces mots sont clairs et plein de justesse, on sent qu'elle se préoccupe véritablement de la manière dont sont perçus les enfants et qu'elle connaît bien son sujet, ayant fait des recherches dessus. 

Un petit livre qui se lit très rapidement mais qui n'en est pas moins passionnant.


samedi 22 janvier 2022

L'homme qui savait la langue des serpents - Andrus Kivirähk

Par Ariane

Auteur : Andrus Kivirähk

Titre : L’homme qui savait la langue des serpents

Genre : roman

Langue d’origine : estonien

Traducteur : Jean-Pierre Minaudier

Editeur : Le Tripode

Nombre de pages : 440p

Date de parution : août 2013

 

Mon avis : 

Il y a des signes qui ne trompent pas. Quand pendant la journée on pense régulièrement au livre en cours, qu’on a hâte de le retrouver, qu’on s’y replonge dès que possible et qu’on a du mal à le lâcher… Alors on sait qu’on tient un coup de cœur ! Et pourtant, j’en aurais mis du temps avant de me lancer dans la lecture de ce roman, dont je n’avais entendu que du bien, mais qui attendait dans ma PAL depuis plusieurs années.

Quel incroyable, fascinant et étrange roman ! Dans cette fable, le merveilleux est habituel. Les hommes vivent dans la forêt, ils parlent la langue des serpents, se nourrissent du lait des louves qu’ils montent pour partir au combat. Mais ce monde est en train de disparaître. Leemet est le dernier de sa lignée, le dernier garçon né dans la forêt, le dernier à parler la langue des serpents. Après l’arrivée des moines et des chevaliers allemands, il voit son peuple abandonner la forêt et les traditions de leurs ancêtres, pour devenir paysans, prier dans les églises et oublier la langue des serpents.

L’auteur nous dit que les hommes cherchent désespérément des explications à ce qu’ils ne comprennent pas. Pour le Sage de la forêt, ce sont les esprits, qui punissent ou qui récompensent. Pour les villageois, le diable trompe et Dieu protège.  Peu de différences finalement… L’homme n’est que le jouet d’esprits supérieurs et ne peut que se plier à leurs volontés et tenter de s’attirer leurs bonnes grâces, par les sacrifices ou la prière. Outre cette critique de l’obscurantisme religieux, aussi ignorant que violent, le texte nous met en garde aussi bien contre la fascination devant les promesses de la modernité ou le repli sur un passé idéalisé.

Conte, fable, pamphlet, … ce récit protéiforme est aussi l’histoire profondément émouvante d’un jeune garçon que nous voyons devenir homme et qui voit son monde s’effondrer. Il nous raconte son histoire, avec une voix tantôt innocente, tantôt sarcastique, tantôt révoltée, … Avec lui on rit, on pleure, on tremble de peur ou de rage. Ils sont rares les romans à provoquer une telle réaction ! Je n’oublierai pas de sitôt Leemet, Ints la vipère royale, Nounours l’ours brun libidineux, les anthropopithèques et leur élevage de poux…

Extrait :

« J’étais vraiment une feuille morte, une feuille de l’an dernier qui par malheur avait poussé trop tard pour voir la splendeur de l’été. »

« « Il y en a qui croient aux génies et fréquentent les bois sacrés, et puis d'autres qui croient en Jésus et qui vont à l'église. C'est juste une question de mode. Il n'y a rien d'utile à tirer de tous ces dieux, c'est comme des broches et des perles, c'est pour faire joli. Rien que des breloques pour s'accrocher au cou pour faire joujou. »

« Tout à une fin. Le dernier homme pourvu de crochets à venin, et qui savait voler par-dessus le marché, est mort aujourd'hui. Dans l'avenir, les gens penseront que de telles choses n'existent que dans les contes de fées. »