Pages

samedi 14 décembre 2019

Martin Eden - Jack London

Par Ariane
  


Auteur : Jack London
Titre : Martin Eden
Genre : roman
Langue d’origine : anglais
Traductrice : Francis Kerline
Editeur : Libretto
Nombre de pages : 464p
Date de parution : novembre 2010

Présentation de l’éditeur :
Martin Eden, le plus autobiographique des romans de Jack London, est le récit d’un écrivain né dans les bas-fonds, homme de rien basculé dans la bourgeoisie qui croit tenir sa revanche sur la vie…
C’est aussi la rencontre d’un homme et d’une femme ; l’occasion enfin de découvrir le vrai visage de Jack London, une personnalité rare à la source de notre modernité. Son œuvre, dont Martin Eden est le point d’orgue, a fasciné des millions de lecteurs.

Mon avis :
Jack London m’avait déjà surprise il y a quelques années avec La peste écarlate, roman bien éloigné de ses célèbres romans que l’on cantonne, à tort, au rayon jeunesse. Le talent d’écrivain de London n’est pas donc pas une découverte, mais ce roman me laisse éblouie.
Martin Eden débarque comme un éléphant dans un magasin de porcelaine dans la demeure cossue de la famille Morse. Il faut dire d’un abîme a priori infranchissable sépare le monde de Martin Eden, jeune marin né dans les quartiers populaires d’Oakland, de celui de cette famille bourgeoise et intellectuelle. Dès cette première visite, Martin tombe éperdument amoureux de Ruth, la fille de la famille. Charmante, élégante et éduquée, elle semble une déesse aux yeux de Martin. Pour la conquérir et se rendre digne d’elle, Martin est prêt à tout. Travailleur acharné sur le pont d’un bateau, il mettra la même ferveur à faire son éducation, dévorant livre sur livre, découvrant la littérature, l’histoire, les sciences, la philosophie et la politique. Et Martin se révèle brillant, perspicace et talentueux, bien plus que celle qu’il aime et que ceux qu’il admirait tant.
Etrangement, il m’est souvent difficile de parler des livres qui me touchent le plus. Comment exprimer toutes les émotions d’un livre qui m’a fait vibrer ? Les réflexions qu’il a suscitées ? Difficile souvent de trouver les mots. Peut-être n’est-ce pas si étrange après tout. Il m’est donc difficile de parler de Martin Eden.
Ah Martin Eden ! Sublime personnage ! Un jeune marin sans éducation que l’on pourrait prendre pour un rustre. Riche d’une solide expérience de la vie, mais parfois étrangement candide. Rêveur idéaliste en même temps qu’étrangement perspicace et réaliste. Brillant et talentueux. Sans éducation, une toile vierge, un esprit libre de toute influence, qui se développe et s’épanouit au gré de ses lectures. Un esprit brut, un talent pur et un cœur tendre, tel est Martin Eden.
Quel contraste avec Ruth ! Si la jeune fille apparaît telle une déesse de beauté, raffinée et intellectuelle à Martin, le lecteur voit surtout qu’elle est tout ce que Martin n’est pas. Conventionnelle et sans imagination, elle tente de l’aider à s’éduquer mais en l’enfermant dans le carcan de son esprit étriqué.
Au travers de Martin Eden, Jack London nous parle du monde qui l’entoure, dressant un portrait peu flatteur de ces bourgeois qui se prennent pour des intellectuels mais n’ont aucune imagination, qui ne font que répéter ce qu’ils ont entendu et ce qu’on leur a appris, sans avoir pris la peine d’essayer de se faire une idée personnelle. Les classes populaires ne sont pas mieux, abruties de dur labeur et d’alcool, incapables de penser, d’imaginer ou de rêver, insensibles à la beauté. L’édition et le milieu littéraire, les intellectuels et les universitaires, les politiques et les militants, tout le monde en prend pour son grade.
L’amour, les rêves, les espoirs, tout n’apporte que désillusion. Martin Eden s’est extirpé à la force de son esprit de la boue originelle, il a atteint des sommets que peu d’autres hommes ont atteint, pour n’y trouver que la solitude et la tristesse. Et c’est également avec un sentiment de tristesse et de désillusion que l’on referme le livre. Mais impossible d’oublier Martin Eden, d’oublier la force de ce personnage, la beauté de son histoire, l’image de Jack London qui est Martin Eden.

Extrait :
« Avant, je ne savais pas que la beauté avait un sens. Je l’acceptais comme telle, comme une réalité sans rime ni raison. J’étais dans l’ignorance. A présent, je sais, ou plus exactement, je commence à savoir. Cette herbe me paraît beaucoup plus belle maintenant que je sais pourquoi elle est herbe, par quelle alchimie du soleil, de la pluie et de la terre elle est devenue ce qu’elle est. »

« La masse de livres qu'il lut ne lui servit qu'à stimuler son impatience. Chaque page de chaque volume n'entrebâillait qu'une fenêtre minuscule du paradis intellectuel, et son appétit, aiguisé par la lecture, augmentait à mesure. »

« Autrefois, il s’imaginait naïvement que tout ce qui n’appartenait pas à la classe ouvrière, tous les gens bien mis avaient une intelligence supérieure et le goût de la beauté ; la culture et l’élégance lui semblaient devoir marcher forcément de pair et il avait commis l’erreur insigne de confondre éducation et intelligence. »

« L'idée que cet homme venu de l'autre versant de la montagne pût avoir des conceptions plus étendues et plus profondes que les siennes ne l'effleurait même pas. Ses vues se limitaient à l'horizon qu'elle connaissait - et les esprits limités ne voient que les limites des autres. »

« Sur les rayons des bibliothèques je vis un monde surgir de l'horizon »


15 commentaires:

  1. Noté depuis bien longtemps, mais toujours pas lu ..

    RépondreSupprimer
  2. Comment ne pas aimer Martin Eden ! Un chef d'oeuvre !

    RépondreSupprimer
  3. Je l'ai deux fois ! J'ai adoré :-)

    RépondreSupprimer
  4. comme Aifelle, noté depuis longtemps. London fait partie des auteurs bien trop négligé par moi-même et j'espère changer ça…

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai l'impression que London est sous-côté par de nombreux lecteurs (moi y compris jusqu'à la lecture de La fièvre écarlate, et plus encore après Martin eden)

      Supprimer
  5. J'ai beaucoup aimé ce livre et les citations que tu présentes me touchent beaucoup. La peste écarlate ? Je ne connais pas mais je retiens le titre.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La fièvre écarlate est un petit ovni (ou plutôt un olni, objet littéraire non identifié 😁)

      Supprimer
  6. Un personnage puissant qui marque la mémoire. Je note le titre.

    RépondreSupprimer
  7. Un chef d'oeuvre, je n'ai pas d'autres mots pour qualifier ce roman.

    RépondreSupprimer
  8. Coucou ! Je viens également de découvrir cette oeuvre immense ! La fin m'a vraiment mise en colère. C'est un transfuge de classe qui tombe dans la dépression, alors que, s'il avait trouvé la voie du socialisme, il aurait trouvé un sens à sa vie, une lutte commune !

    RépondreSupprimer