vendredi 13 octobre 2023

Chasseur, cueilleur, parent - Michaellen Doucleff

 Par Daphné









Résumé de l'éditeur:

 Épuisée, gagnée par la dépression, Michaeleen ne sait plus comment gérer Rosy, sa fille de 3 ans. Crises de rage, demandes incessantes, pleurnicheries… Elle rencontre des difficultés que tous les parents connaissent. Tous ? Peut-être pas.
Habituée aux reportages dans les coins reculés, elle décide d’aller vivre avec Rosy en immersion dans trois des plus vénérables communautés du monde : les Mayas, les Inuits et les Hadza. Elle découvre des enfants responsables, autonomes, participant volontairement aux tâches ménagères, et ce sans cri ni conflit. Une parentalité aux antipodes de celle qu’elle pratique, sans aucune des luttes de pouvoir qui jonchent son quotidien avec Rosy. Et si les Occidentaux avaient tout faux en termes d’éducation ?

Mon avis :

Voici un livre qui me laisse un sentiment assez partagé. A force de le voir partout, j'avais très envie de le lire mais je ne m'attendais pas du tout à ça. J'ai commencé sa lecture en pensant avoir à faire à un livre anthropologique sur les différentes manière dont les parents se comportent avec leurs enfants à travers le monde. 

Alors certes, c'est bien une bonne partie du thème de ce livre. A travers le voyage d'une mère, il nous entraîne dans diverses cultures où l'on découvre le quotidien des familles, où l'on se rend bien compte que certaines "pratiques" occidentales envers les enfants sont assez étonnantes. Pas étonnantes de manière positive mais étonnantes par leur manque de logique si tant est qu'on y réfléchit quelques instants. Et pourtant, les parents occidentaux y sont tant habitués que cela leur paraît évident. On découvre à travers ce livre à quel point les cultures dites ancestrales sont éloignées de ces pratiques et à quel point leur manière de voir et d'accompagner leurs enfants dans la vie peut être différente des "pratiques" occidentales. J'ai beaucoup aimé cette partie du livre qui nous fait réfléchir sur notre société, sur tout ce qui nous est inculqué en matière de parentalité, sur la manière de percevoir l'enfant. Regarder comment les choses se passent ailleurs, y réfléchir, s'en inspirer parfois est, anthropologiquement parlant, particulièrement intéressant. Au fond, la plupart des observations relevées par ce livre tombent sous le sens. J'ai donc beaucoup aimé cette partie là du livre.

 En revanche, je ne m'attendais pas tellement à lire un manuel de conseils sur "comment rendre votre enfant exactement conforme à vos attentes" : car c'est aussi l'impression que m'a laissé ce livre et cela m'a de nombreuses fois mise assez mal à l'aise. Cette impression que l'autrice voulait formater sa fille à ses attentes. Elle utilise d'ailleurs très souvent l'expression "modeler le comportement", ce qui pour tout dire, m'interpelle.  Vouloir "modeler" l'enfant ne revient-il pas à le manipuler de manière à ce qu'il soit tel qu'on voudrait qu'il soit, à gommer les traits de sa personnalité propre et à ne pas l'accepter tel qu'il est ? Je ne sais pas quel est le terme utilisé dans la version originale alors peut-être est simplement la traduction qui m'a interpellée mais cette expressions ans cesse répétée m'a vraiment mise mal à l'aise. De même que les phrases du style : de mon "ennemie", elle est devenue l'une de mes personnes préférées au monde. Cette phrase fait référence à la fille de l'autrice et n'a pas été sans me faire tiquer. Même si le mot "ennemie" est entre guillemet, le fait qu'il s'adresse à une enfant, son enfant, de trois ans me parait un peu inquiétant. De même que le fait que l'enfant en question ne faisait donc pas partie des "personnes préférées" de l'autrice avant qu'elle ne "réussisse à modeler son comportement". Il est vrai que la petite Rosy, la fille de l'autrice nous est décrite comme une enfant assez terrible... d'où la question : mais comment peut on en arriver là avec une enfant aussi jeune? Car le tableau qui nous est dépeint dans les premières pages concernant la fillette, peut en effet paraître assez terrifiant... mais au fond, l'enfant est elle vraiment "terrible" ou est ce la mère qui est étouffante, très étouffante même,  si on en croit le fait  qu'elle lance  à son lecteur le défi de rester au moins 5 minutes sans chercher à occuper son enfant ? Je ne cherche pas du tout à juger la mère qu'est l'autrice du livre, surtout qu'on voit bien qu'elle fait ce qu'elle pense être bon (et dans la majorité des cas, c'est bien là où le bât blesse) et on sent vraiment sa volonté d'améliorer les choses avec sa fille. Mais tout de même, nombre de ses propos m'ont paru assez étranges...

Il n'en reste pas moins que j'ai beaucoup aimé voyager à ses cotés auprès de différentes familles de différentes cultures. Une lecture en demi teinte, donc. Sans doute en retiendrais je surtout le côté anthropologique qui est, au départ, ce que je venais chercher avec cette lecture.


Extrait  

"Ces enfants ne sont pas des planètes solitaires. Ils appartiennent à un système solaire, décrivant des cercles les uns autour des autres, et sont stabilisés par la présence et la gravité d'autrui.
Ces liens s'expriment de deux manières : les responsabilités envers autrui et un filet de protection invisible."