Par Daphné
Résumé de l'éditeur :
"La première fois que Mélanie Claux et Clara Roussel se rencontrèrent, Mélanie s’étonna de l’autorité qui émanait d’une femme aussi petite et Clara remarqua les ongles de Mélanie, leur vernis rose à paillettes qui luisait dans l’obscurité. “On dirait une enfant”, pensa la première, “elle ressemble à une poupée”, songea la seconde. Même dans les drames les plus terribles, les apparences ont leur mot à dire." À travers l’histoire de deux femmes aux destins contraires, Les enfants sont rois explore les dérives d’une époque où l’on ne vit que pour être vu. Des années Loft aux années 2030, marquées par le sacre des réseaux sociaux, Delphine de Vigan offre une plongée glaçante dans un monde où tout s’expose et se vend, jusqu’au bonheur familial.
Mon avis :
Il y a deux ou trois ans, une personne de ma connaissance m'a montré plusieurs vidéos sur Youtube où étaient mis en scène des enfants faisant des "pranks" (sortes de canulars) avec leur père. Sur le coup, je n'y ai pas prêté attention, me demandant seulement quel était l'intérêt de ces vidéos tant leur contenu me paraissait stupide. Ce n'est qu'un peu plus tard que j'ai réalisé que ce même genre de vidéos se reproduisaient à l'infini et me suis questionné sur le droit à l'image de ces enfants qui n'étaient pas comme je l'avais cru au début des enfants acteurs. Non, c'étaient des enfants filmés par leur père encore et encore, reproduisant sans cesse des scénettes plus affligeantes les unes que les autres (entre autres le déballage d'une montagne de cadeaux censée faire de la pub à une marque en particulier). Je me rappelle m'être retrouvée consternée devant ces vidéos que me montraient une personne qui les voyait simplement comme quelque chose d'amusant. Je n'y voyais quand à moi aucun amusement et me sentais très mal à l'aise pour ces enfants exhibés ainsi sur youtube...
Les enfants sont rois traitent de ce sujet là. Sous une forme romancée, ce livre dénonce les dérives du monde virtuel. Mélanie, au lycée, rêve devant Loft Story. Des années plus tard, maman de deux enfants, elle se lance dans une course effrénée visant à obtenir le plus de like possible en filmant ses enfants à tout va et les exposant sans arrêt sur internet.... le tout générant des sommes d'argent ahurissantes. Ses abonnés sont ses chéris, à qui elle ne cache rien de sa vie privée... et de celles de ses enfants, rois d'un monde virtuel dont les images sont surexposées encore et encore... Jusqu'au jour où sa fille de six ans, la petite Kimmy disparaît. Clara, enquêtrice, découvre alors avec effroi le monde des enfants influenceurs.
Ce livre est absolument glaçant. On y découvre la réalité des enfants influenceurs, l'exposition médiatique, la surconsommation, les dérives des réseaux sociaux... et le plus terrifiant, c'est que bien que l'on soit dans un roman...tout cela existe réellement. C'est avec un regard très lucide et beaucoup de finesse que Delphine de Vigan traite de ces dérives remontant jusqu'aux premières émissions de téléréalité jusqu'au dérives des réseaux sociaux d'aujourd'hui et s'interroge avec beaucoup de justesse. Jusqu'où sont prêts à aller les gens pour se croire aimer à grand renforts d'émogis? Faut-il être vu pour se sentir exister ?
Un roman qui questionne, qui dérange, qui fait mouche. On le referme au bord de la nausée et pourtant, il n'y a qu'à regarder autour de soi pour constater à quel point il est d'actualité...
Extrait :
"Une troisième hypothèse effleura Clara : cette femme n'était ni une victime ni un bourreau, elle appartenait à son époque. Une époque où il était normal d'être filmé avant même d'être né. Combien d'échographies étaient publiées chaque semaine sur Instagram ou Facebook ? Combien de photos d'enfants, de famille, de selfîes ? Et si la vie privée n'était plus qu'un concept dépassé, périmé, ou pire, une illusion ? Clara était bien placée pour le savoir. Nul besoin de se montrer pour être vu, suivi, identifié, répertorié, archivé. La vidéosurveillance, la traçabilité des communications, des déplacements, des paiements, cette multitude d'empreintes numériques laissées partout avaient modifié notre rapport à l'image, à l’intime. À quoi bon se cacher puisque nous sommes si visibles semblaient dire tous ces gens, et peut-être avaient-ils raison ?"
Un bon livre, je n'ose dire roman tellement c'est crédible. Oui, ça fait peur;
RépondreSupprimerTrès peur en effet. Je trouve ça véritablement glaçant et ça me questionne beaucoup.
SupprimerDaphné
Comme toi, je me questionne sur : pourquoi se filmer en train de déballer des jouets (ou autre), et pourquoi regarder ?!
RépondreSupprimerLe fait de déballer des jouets est clairement une histoire de surconsommation, attirer les marques, les faire connaitre, se faire offrir des produits. Une bien triste manière d'"utiliser" ses enfants... Pourquoi regarder, quelle bonne question... apparemment, certains trouvent ça drôle... moi je trouve ça profondément triste...
SupprimerDaphné
Rebonsoir, un bon livre, le premier que je lisais de Delphine Le Vigan. Ce qui est effrayant, ce sont les parents qui se servent de leurs enfants. Bonne soirée.
RépondreSupprimerOui, effrayant, le mot est juste...
SupprimerDaphné