Auteur : Christoph Hein
Genre : roman
Langue d’origine : allemand
Traductrice : Nicole Bary
Editeur : MetailiéNombre de pages : 417
Date de parution :2010
Résumé de l'éditeur :
Paula veut être peintre, elle ne veut que cela. La petite fille terrorisée par son père va trouver la force de s'opposer à lui d'abord, puis à son mari. Elle luttera pour exister, pour disposer de son corps, puis pour faire des études aux Beaux-Arts. Elle en paiera le prix : elle renoncera à son premier enfant. Paula se cuirasse contre ses sentiments, elle se construit contre les hommes, qu'elle n'hésitera pas à utiliser pour réaliser son rêve : peindre comme elle le veut, dans une Allemagne de l'Est où il est dangereux de s'éloigner des canons du réalisme socialiste. Christoph Hein crée un personnage magnifique de femme forte et pourtant si faible, qui est aussi une métaphore de la difficulté à être un créateur à certaines époques et une illustration du degré de contrôle et d'égoïsme nécessaire à qui sent et sait qu'il doit construire une oeuvre, qu'il y arrive ou pas. Un grand roman aussi émouvant que dérangeant.
Mon avis :
Voici un livre aussi complexe que son héroïne. Complexe non dans
son écriture mais dans les sentiments ambigus que l'on retire d'une telle
lecture. Complexe également dans la diversité des thèmes qu'il aborde. Parmi
ces thèmes, on retrouve celui de l'art, de la conception différente que s'en
font les gens. Ce roman nous parle également de l'Allemagne de l'est, de la
mutation d'un pays à travers plusieurs décennies.
Mais avant tout, ce livre nous offre un portrait remarquable, celui de Paula, une femme hors du commun. Paula est une femme blessée dont l'enfance a été saccagée par la dureté de son père et l’alcoolisme de sa mère. C'est une femme dure, intransigeante, prête à tout pour vivre son rêve. Créatrice dans l'âme, passionnée par la peinture, Paula veut en faire son métier et ne reculera devant rien pour y arriver. Elle tiendra tête à son père et à son mari, puis aux hommes en général. Elle refuse de tomber amoureuse, se méfiant puis se jouant des hommes avec, parfois, une certaine cruauté. Elle qui fut blessée par des hommes, les blesse également. Ses sentiments envers les femmes, qui conserveront une certaine ambiguïté durant longtemps sont plus doux, sans doute plus passionnés aussi. Mais que ce soit d'une femme ou d'un homme, Paula, tout au long de sa vie, refusera l'amour, lui préférant la peinture.
Ses relations avec ses enfants sont tout aussi compliquées, choquantes aussi, notamment avec sa fille aînée. Paula assume et explique ses choix mais celui concernant sa fille est sans doute ce qui m'aura le plus perturbée durant cette lecture. Paula défend sa liberté à tout prix, quitte à la faire passer avant sa propre fille. La liberté et l'indépendance féminine sont en effet des piliers centraux ce cette histoire et de la vie de Paula. Dans une société qui évolue mais où la place de la femme est encore secondaire, elle lutte pour avoir le contrôle de sa vie, pour s'inscrire en tant que femme et artiste et non en tant qu'épouse et mère de famille.
Paula n'est pas particulièrement sympathique et ne cherche pas à l'être. Elle se veut libre et recherche dans la peinture une certaine conception du monde et de la vie. Femme qui attire, femme qui repousse, Paula est un personnage on ne peut plus complexe dont l'auteur nous dresse un très grand portrait. Le portrait d'une femme qui se bat, qui cherche à se définir à travers l'art. Jusqu'à la fin, le lecteur s'interroge sur la personnalité de Paula. Tout comme elle, il ne trouvera pas réponse à toutes ses questions.
Un roman puissant et profondément féministe, où le contexte historique est plus important qu'il ne paraît au premier abord. Un roman quelque peu dérangeant, qui interroge et ne laisse pas indifférent.
"J'ai promis de vivre avec toi, mais je n'ai pas dit que j'abandonnerai tout pour toi, que je sacrifierais ma vie pour la tienne. Je voulais vivre avec toi, mais je ne suis pas prête à mourir pour toi. Tu n'es pas assez mignon pour ça mon ami. "
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