Auteur :
Mathieu Belezi
Titre :
Un faux pas dans la vie d’Emma Picard
Genre :
roman
Langue
d’origine : français
Editeur :
Flammarion
Nombre de
pages : 256p
Date de
parution : janvier 2015
Présentation de l’éditeur :
Emma Picard et ses quatre enfants se sont installés entre
Sidi Bel Abbes et Mascara à la fin des années 1860. Le gouvernement tentait de
peupler l'Algérie récalcitrante et offrait aux colons des terres agricoles.
L'auteur fait revivre cette période effroyable pour les colons pauvres
confrontés à une avalanche de catastrophes naturelles.
Mon avis :
Dans ce long monologue Emma Picard raconte sa vie de colon
en Algérie dans les années 1860. Un monologue qu’elle interrompt régulièrement
pour s’adresser directement à son dernier fils malade. Elle raconte l’espoir d’une
vie meilleure et la désillusion, elle raconte le travail harassant, la misère,
la famine, la maladie, la nature hostile. Emma est une femme au bord de l’abîme
qui a tout perdu. Raconter lui permet d’exorciser ces années de malheur, car l’Algérie
ne lui aura offert que cela. C’est un texte bouleversant. L’alternance du
discours d’Emma et ces interpellations à son fils donnent un texte rythmé.
Emma est une mère avant tout. Elle est coupable selon elle. Coupable d'avoir cru en l'avenir, coupable d'avoir cru en une vie meilleure, coupable d'avoir provoqué le destin. Elle nous livre sa confession sans fard.
J’ai tout de même un souci avec ce texte : les phrases
se succèdent sans ponctuation (en tout cas sans point) ni majuscules. D’un côté
je comprends que cela donne le rythme d’une litanie au texte. Mais tout de
même, je n’en ai pas compris l’intérêt. C’est une mode ou quoi ? Au cours
des derniers mois je crois en avoir lu au moins quatre. Si parfois cela semble
en adéquation avec le narrateur (La couleur du lait de Leyshon Nell où la
narratrice est une jeune domestique sachant à peine lire et écrire et qui écrit
son histoire) dans d’autre cas comme dans Charlotte je n’en vois pas du tout
l’intérêt.
J’ai par ailleurs aimé découvrir l’histoire de ces colons
arrivés en Algérie un peu par hasard au cours du 19ème siècle. Des
paysans, des travailleurs dans la misère à qui l’on faisait miroiter un avenir
meilleur et qui sont partis des rêves pleins la tête pour se retrouver
confrontés à une réalité bien différente de ce qu’ils avaient imaginé. A cette
époque, l’Algérie est une terre française et on le ressent bien dans le texte
de Mathieu Belezi, Emma ne côtoie que des colons et les Algériens sont au mieux
employés par les Français et le plus souvent écartés dans la montagne et
condamnés à une vie misérable.
Un texte puissant et émouvant que je recommande.
Extrait :
« j’espère que tu
as fini par t’endormir, et que tu ne m’entends pas te raconter tout ça, mon
pauvre fils, j’espère même que tu dors sur tes deux oreilles et que tu ne m’entends
pas te déballer dans le détail l’histoire de notre aventure coloniale, comme si
c’était vital pour moi de forcer ma nature et d’accepter le grand déballage de
mes fautes, car fautes il y a
les grillons ont beau
chercher à m’entortiller la mémoire en répétant la note têtue de leur rengaine
nocturne au seuil de la porte qui marque la frontière entre eux et moi, ils ne
sauraient me convaincre du contraire
oui fautes il y a,
dans la mesure où je n’ai pas su comprendre que je n’avais rien à faire sur ces
terres africaines, rien à conquérir, rien à construire, rien à espérer, surtout
pas une vie meilleure, car l’Algérie était bien incapable de m’offrir quoi que
ce soit
Léon, si je ne m’étais
pas laissée berner par la France, vous seriez tous encore en vie et tous autour
de moi, alors ne m’en veux pas de te raconter ce qui se raconte et ce qui ne se
raconte pas dans la vie d’une femme, c’est l’heure de mon grand déballage
l’heure de forcer ma
nature, de ravaler mes pudeurs, et de ne pas avoir peur d’être grossière si
c’est nécessaire
mais j’espère quand
même que tu ne m’entends pas te raconter tout ça, mon pauvre fils »
D'autres avis chez Clara,
Il est dans ma pal et je suis certain qu'il va me plaire.
RépondreSupprimerJe le pense aussi. Bonne lecture !
SupprimerAriane
je n'ai pas été gênée par la la narration, une découverte forte pour moi !
RépondreSupprimerCela ne m'a pas vraiment dérangée mais je n'en ai pas compris l'intérêt. Mais c'est également pour moi une lecture forte et marquante.
SupprimerAriane