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lundi 18 septembre 2023

Coeur du Sahel - Djaïli Amadou Amal

 Par Daphné








Autrice :Djaïli Amadou Amal

Titre : Coeur du Sahel
Genre : roman

Langue d’origine : français
Date d'édition:2022
Nombre de pages :364

Editeur : Emmanuelle Colas

Résumé de l’éditeur:

 Faydé vit dans les montagnes dans l’extrême-nord du Cameroun. Pour que sa mère, ses frères et sa sœur ne soient pas dans le besoin, son beau-père ayant disparu au cours d’une razzia de Boko Haram, la jeune adolescente décide de partir à Maroua, la ville la plus proche, où elle sera domestique. Comme ses comparses, elle devra se faire à sa nouvelle vie, citadine et difficile pour les filles. Mépris de classe, mauvais traitements, viols… Comment Faydé parviendra-t-elle à se frayer son chemin dans un environnement, où son destin semble tracé à l’avance ?

Mon avis :

Faydé a 15 ans et vit dans un petit village du Sahel dans des conditions très difficiles où les sécheresses se succèdent. Pour subvenir aux besoin  e sa mère et de ses frères et sœurs, elle décide de tenter sa "chance" en allant travailler en ville pour une riche famille. Elle y découvre une vie bien différente de la sienne, une vie où elle doit se rendre invisible aux yeux de ses patrons, où tout le travail accompli ne mérite qu'un pauvre salaire et bien peu de reconnaissance, où elle se retrouve confrontée au mépris, aux injures, où les hommes ont plein pouvoir sur elle. Faydé pourtant, tombe sur une "bonne "maison où elle découvre aussi certains avantages mais n'échappera pas au chagrin, au mépris, verra certaines de ses amies s'en sortir plutôt bien alors que d'autres connaîtront un destin cruel. 

Ce livre nous plonge en plein cœur du Sahel  où les conditions de vie des femmes ne nous sont pas épargnées. On y découvre que si être femme dans un village isolé et soumis à la sécheresse est terrible, être femme en ville n'est pas enviable non plus. Si nous sont décrites plus particulièrement les vie des domestiques et du mépris et de l'indifférence auxquelles elles sont soumises, on y rencontre aussi les femmes des concessions, filles ou co-épouses, qui, si elles ont l'avantage de la richesse, restent sous la domination masculine. 

 Ce livre est un cri de révolte, un cri d'espoir aussi car, oui, l'espoir y est bel et bien présent. C'est un livre on ne peut plus engagé, un livre qui défend l’éducation des filles, la place de la femme dans une société ô combien patriarcale. Faydé n'a pas une vie facile mais c'est un personnage lumineux auquel on ne peut que s'attacher. 

Me restent à découvrir les autres livres de cette autrice que j'ai maintenant très envie de lire!

 

Extrait  

 "Ouvre grandes tes oreilles et écoute bien ce qu’on te dit car on ne va pas le répéter. Ils sont les patrons et tu dois les respecter comme tels. Ne jamais t’asseoir à côté d’eux mais plutôt en retrait. S’ils sont sur un fauteuil, tu restes sur le tapis. S’ils sont sur une natte, tu t’installes sur le sable. Si tu remarques qu’ils ont des places préférées, même si c’est au pied d’un arbre, jamais, au grand jamais, tu ne dois t’approcher de cette place-là. Sauf, bien sûr, pour la nettoyer."

lundi 22 janvier 2018

Voici venir les rêveurs -Iimbolo Mbue

Par Daphné















Auteur : Voici venir les rêveurs
Titre : Imbolo Mbue
Genre : roman
Langue d’origine : anglais (Cameroun)
Traductrice : Sarah Tardy
nombre de pages : 499
Éditeur :Pocket
Date d'édition : 2016

Résumé de l'éditeur :

Ils ont traversé l'Atlantique pour vivre leur rêve, le vrai, l'américain. Originaire du Cameroun, Jende Jonga sait que le sort de sa famille repose sur l'obtention d'un visa de travail. Des études pour sa femme, Neni, un avenir pour son fils, Liomi... Après plusieurs petits boulots clandestins, Jende croit enfin tenir sa chance : un job de chauffeur pour Clark Edwards, riche banquier de Manhattan. Mais nous sommes en 2007, et la crise des subprimes réserve, à tous, un réveil brutal... Choc des cultures et quête du bonheur : le rêve que l'on poursuit n'est pas toujours celui qu'on croit...

Mon avis :

Quelques jours après Noël, j'ai eu la surprise de trouver dans ma boîte aux lettres un colis que je n'attendais pas du tout : un swap surprise de la part de ma co-blogueuse, Ariane! Et dans ce colis, se trouvait Voici venir les rêveurs : merci Ariane, à la fois pour la surprise et pour avoir si bien choisi ce livre!

Jende et sa famille ont enfin ce qu'ils attendaient depuis longtemps : une vie en Amérique, loin de leur Cameroun natal. La vie dont ils ont toujours eu envie mais une vie clandestine car ils tentent d'obtenir la green-card qui leur permettra enfin d'accéder totalement à leur rêve américain.   Après avoir enchaîné plusieurs petits boulots, Jende est embauché comme chauffeur auprès du riche M.Edwards. Les deux hommes n'ont rien en commun et ont des vies radicalement opposées mais malgré tout, un lien se formera entre leurs deux familles.

Avec Jende et sa famille, nous plongeons dans les chimères du rêve américain, dans les difficultés d'obtention des papiers, dans la différence entre les cultures. Jende et sa femme Neni sont persuadés qu'une vie meilleure les attend en Amérique. Ils veulent y rester coûte que coûte mais leur Eldorado leur apportera t-il ce qu'ils désirent réellement? Au fond suffit-il d'être riche et américain pour être heureux? La vie de Clark Edwards et sa famille nous en fait douter. 

J'ai aimé suivre les histoires de ces deux familles si différentes l'une de l'autre et suivre l'histoire de Jende, ses espoirs et ses désillusions. J'ai aimé cette réflexion sur la société américaine, la place accordée dans ce pays à ceux qui se battent pour y vivre, la crise économique, le choc des cultures, l’attachement aux racines mais le désir toutefois de se faire une place dans le pays tant convoité. Il y a un certain humour dans ce livre mais également beaucoup d'émotions et les personnages sont attachants, présentés avec leurs qualités et leurs défauts, leurs rêves et leurs déceptions. 


Un livre fort à la réflexion subtile que j'ai beaucoup aimé. 

Extrait :

"Les gens refusent d'ouvrir les yeux et de voir la vérité parce qu'ils préfèrent rester dans l'illusion. Du moment qu'on les abreuve des mensonges qu'ils veulent entendre, ils sont contents. La Vérité ne leur importe pas"


mardi 17 mars 2015

La saison de l'ombre - Léonora Miano

Par Ariane
prix fémina 2013
Auteur : Léonora Miano
Titre : La saison de l’ombre
Genre : roman
Langue d’origine : français
Editeur : Grasset
Nombre de pages : 235p
Date de parution : août 2013 

Présentation de l’éditeur :
Si leurs fils ne sont jamais retrouvés, si le ngambi ne révèle pas ce qui leur est arrivé, on ne racontera pas le chagrin de ces mères. La communauté oubliera les dix jeunes initiés, les deux hommes d'âge mûr, évaporés dans l'air au cours du grand incendie. Du feu lui-même, on ne dira plus rien. Qui goûte le souvenir des défaites ? »
Nous sommes en Afrique sub-saharienne, quelque part à l'intérieur des terres, dans le clan Mulungo. Les fils aînés ont disparu, leurs mères sont regroupées à l'écart. Quel malheur vient de s'abattre sur le village ? Où sont les garçons ? Au cours d'une quête initiatique et périlleuse, les émissaires du clan, le chef Mukano, et trois mères courageuses, vont comprendre que leurs voisins, les Bwele, les ont capturés et vendus aux étrangers venus du Nord par les eaux.
Dans ce roman puissant, Léonora Miano revient sur la traite négrière pour faire entendre la voix de celles et ceux à qui elle a volé un être cher. L'histoire de l'Afrique sub-saharienne s'y drape dans une prose magnifique et mystérieuse, imprégnée du mysticisme, de croyances, et de « l'obligation d'inventer pour survivre. 

Mon avis :
Voici une lecture qui change assurément de mes lectures habituelles. Je lis rarement de la littérature africaine, par méconnaissance je pense.
Léonora Miano signe ici un roman magnifique abordant un sujet particulièrement tabou la traite des esclaves et particulièrement le rôle joué par certaines tribus. Ici, Léonora Miano s’attache à ceux qui reste après la disparition soudaine et inexpliquée de douze hommes du clan des Mulongo. Les membres du clan cherchent à comprendre ce qui est arrivé à ces hommes, les mères sont mises à l’écart du groupe. L’auteur met en scène plusieurs personnages Eseibe, Eyabe, Mukano, Mutango,… qui au cours d’une enquête parfois mystique vont comprendre ce qui est arrivé.
Les européens ne jouent aucun rôle actif dans l’histoire, ils font du troc avec les populations côtières : des tissus et des armes contre des êtres humains. A plusieurs reprises les partenaires commerciaux disent des « hommes au pied de poule » puisque c’est ainsi que sont nommés les européens qu’il faudrait les peindre pour leur donner « figure humaine ». Cette petite phrase m’a amusée, illustrant parfaitement le paradoxe de la perception de l’autre. Pour les européens, c’étaient les africains qui n’avaient pas « figure humaine » ! L’auteur évite soigneusement tout anachronisme ou toute référence à des éléments inconnus des africains. J’ai beaucoup aimé cette immersion.
Les douze hommes disparus du village Mulongo incarnent ces milliers d’hommes, de femmes et d’enfants qui ont été vendus comme esclaves. Léonora Miano leur redonne une identité, elle les replace dans un clan, une famille. Elle expose la blessure, la peur, l’incompréhension de ceux qui ont ainsi perdu un proche. Elle met au jour le comportement de certains clans ayant capturé et vendu d’autres clans.
Le style de Léonora Miano est très particulier. Il m’a fallu m’accrocher un peu au départ pour m’habituer à cette écriture inhabituelle. Mais ensuite, j’ai été totalement subjuguée par ses mots magnifiques.
Une très belle et touchante lecture. 

Extrait :
« Eyabé a l’impression d’entendre le chant de Weya, la terre première. Ceci la trouble quelque peu. Depuis qu’elle s’est mise en route pour trouver le pays de l’eau, elle considère cette dernière comme une puissance hostile, une force néfaste qui lui a ravi son premier né. L’enfant dont la venue au monde a consacré sa féminité aux yeux du clan. Celui grâce auquel il lui a été donné de se découvrir, de se connaître elle-même telle qu’elle ne s’était jamais envisagée. Inventive : combien de mélodies lui sont venues lorsqu’il fallait le bercer ? Savante : elle avait la réponse à ses questions, pas toujours, mais souvent. Douce : oui, elle dont l’adolescence s’était passé à rivaliser au tir à la fronde avec ses frères, à ne décidément pas comprendre l’intérêt des travaux de vannerie. »

Lu dans le cadre du challenge tour du monde en 8 ans pour le Cameroun et Petit bac pour la catégorie couleur