Affichage des articles dont le libellé est littérature nordique. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est littérature nordique. Afficher tous les articles

mardi 27 novembre 2018

Asta - Jon Kalman Stefansson

Par Ariane


Auteur : Jon Kalman Stefansson

Titre : Asta

Genre : roman

Langue d’origine : islandais

Traducteur : Eric Boury

Editeur : Grasset

Nombre de pages : 496p

Date de parution : août 2018

Présentation de l’éditeur :

Reykjavik, au début des années 50. Sigvaldi et Helga décident de nommer leur deuxième fille Ásta, d’après une grande héroïne de la littérature islandaise. Un prénom signifiant – à une lettre près – amour en islandais qui ne peut que porter chance à leur fille… Des années plus tard, Sigvaldi tombe d’une échelle et se remémore toute son existence  : il n’a pas été un père à la hauteur, et la vie d’Ásta n’a pas tenu cette promesse de bonheur.
Jón Kalman Stefánsson enjambe les époques et les pays pour nous raconter l’urgence autant que l’impossibilité d’aimer. À travers l’histoire de Sigvaldi et d’Helga puis, une génération plus tard, celle d’Ásta et de Jósef, il nous offre un superbe roman, lyrique et charnel, sur des sentiments plus grands que nous, et des vies qui s’enlisent malgré notre inlassable quête du bonheur.



Mon avis :

Et une nouvelle fois la magie a opéré… Magie, c’est le mot idéal pour qualifier les romans de Stefansson. Son univers si particulier mêlant la rudesse de l’existence en Islande et la poésie des mots m’enchante à chaque fois.

Sigvaldi le peintre git au sol après avoir chuté de l’échelle. Et il se souvient de son amour fou pour sa jeune épouse Helga, de leur bonheur, du malheur qui a suivi, de sa fille Asta.

Stefansson nous offre l’histoire de Sigvaldi, d’Helga, d’Asta et des autres comme un puzzle au gré des souvenirs de Sigvaldi, des lettres d’Asta ou des réflexions de l’écrivain. Les époques et les personnages alternent sans que le lecteur se sente jamais perdu. Et tout est là : l’amour et la haine, l’espoir et le désespoir, la vie et la mort, les retrouvailles et l’abandon, la famille et les amis. Des personnages forts, beaux et touchants, qu’il est difficile d’oublier tant Stefansson sait leur donner vie. Et en toile de fond, l’Islande magnifique que je rêve de découvrir en réalité un jour. Et enfin, l’écriture si vibrante, si lumineuse, si poétique de Stefansson.

Ce n’est pas mon préféré de Stefansson, mais c’est quand même une merveille !



Extrait :

« Il est facile de vivre en baissant les yeux. L’ignorance vous rend libre alors que la connaissance vous emprisonne dans a toile de la responsabilité. »


« Sigvaldi est capable d’affronter les hivers les plus rudes, les averses les plus drues, les vagues les plus puissantes – mais comment s’y prend-on pour réconforter ? »


« Le dieu moderne de ma consommation n’est en rien différend des divinités antiques : il exige des sacrifices. Le premier de ces sacrifices, c’est celui du simple bon sens. »


vendredi 16 mars 2018

Le jour avant le lendemain - Jorn Riel

Par Daphné















Auteur : Jorn Riel
Titre : Le jour avant le lendemein
Genre : roman
Langue d’origine : danois

Traductrice : Inès JorgensenEditeur : Gaïa
Nombre de pages : 198
Date de parution : 1998


Résumé de l'éditeur :

Le nord-est du Groenland, vers 1860. Ninioq est une très vieille femme qui appartient à la tribu de Katingak, son fils, grand chef et pêcheur réputé. Elle sait que sa vie est sur le point de s'achever. Bientôt va venir pour elle le moment d'aller s'allonger sur la glace afin de mourir dignement. C'est avec sérénité que Ninioq envisage sa fin, car son existence bien remplie la satisfait. Pourtant, une sourde angoisse vient contrarier cette quiétude, un sentiment qu'elle ne sait définir et qui la taraude. Aussi quand, à la fin de l'été, vient le moment, après une pêche miraculeuse, d'aller faire sécher le poisson sur la petite île de Neqe, Ninioq voit avec soulagement l'occasion de se retirer un peu et de profiter de cette solitude pour réfléchir. Manik, son petit-fils préféré, insiste pour l'accompagner et sera le bienvenu. Ils conviennent que leur tribu passera les chercher juste à temps pour participer à la cueillette des myrtilles. Mais le temps passe et la tribune revient pas. L'angoisse de Ninioq commence alors à se préciser et l'idée prend forme que Manik et elle aient pu être abandonnés, qu'ils se retrouvent définitivement seuls au monde. Quel effroyable destin pour le tout jeune Manik, et quelle responsabilité pour Ninioq, si proche de sa fin. Le jour avant le lendemain est une petite perle de sagesse : un récit intense, parfois rude, tout en simplicité, sur le destin, la vie, la mort, par la voix chaleureuse du fabuleux conteur qu'est Jorn Riel.

Mon avis :

Voici un tout petit livre mais qui possède une grande force! au Groenland, dans les années 1960, Ninioq,  se souvient des événements de sa vie. Elle envisage sa mort prochaine sans angoisse car elle a eu une existence bien remplie. Or, elle se retrouve seule sur une île avec Manik son petit-fils de sept ans, sans que personne ne viennent les chercher. La tribu de Nanioq était censée venir les chercher à temps pour la cueillette des baies. Que s'est il passé? Comment la vieille femme et l'enfant vont-ils survivre loin de toute autre vie humaine?

Ce petit livre, plein  sagesse et de beauté nous conte une histoire de filiation, l'histoire de la vie. dans la tribu de Niniok, tout se transmet, que ce soit l'apprentissage de la chasse, la manière de conserver la nourriture, les légendes, les croyances... Tout ce que transmet Ninioq à Manik leur permettent de continuer à exister, à vivre malgré leur solitude et la disparition de leur tribu. 

J'ai appris beaucoup de choses sur la vie des tribus Inuits au XIXème siècle, tant sur leur manière de vivre que sur leur environnement. Malgré le froid glacial du Groenland et les rudes conditions de vie, il y a dans ce livre quelque chose qui réchauffe le cœur, une grande tendresse.  La rudesse du climat contraste avec la douceur de l'écriture. C'est triste et émouvant mais tellement beau à la fois. Un livre dont je me souviendrai.



Extrait :

"Tout était éternel. L’immense nature ne pouvait être anéantie, et l’homme ne faisait-il pas partie de cette nature? Tout ce qui était vivant poussait, se reproduisait et mourait au même rythme éternel que les changements de saison."


mercredi 11 février 2015

Le fils du dieu de l'orage - Arto Paasilinna

Par Ariane



Auteur : Arto Paasilinna

Titre : Le fils du dieu de l’orage

Genre : roman

Langue d’origine : finlandais

Traducteur : Anne Colin du Terrail

Editeur : Gallimard

Nombre de pages : 295p

Date de parution : novembre 1995



Présentation de l’éditeur :

« Rutja, velu, la stature imposante, se leva. Il portait une cape en fourrure d'ours, une coiffure de plumes de rapace et un gourdin noueux à la ceinture. Il regarda calmement son père et les autres dieux puis dit d'une voix puissante : "Je suis prêt à tout. [...] Absolument tout !" »
Et c'est ainsi que le fils du dieu de l'Orage descend aujourd'hui du ciel jusqu'en Finlande avec pour mission de reconvertir les Finnois à la vraie foi de leurs ancêtres.
Tel un Candide venu du fond des âges, il découvre avec stupéfaction les mystères de la condition humaine et les méandres incompréhensibles de la civilisation.
Son apparence ayant de quoi terroriser les populations, il se réincarne en un paisible propriétaire terrien - mais n'hésite pas à frapper de la foudre quiconque lui déplaît. Réussira-t-il à atteindre son objectif ?



Mon avis :

Il y a longtemps que je n’avais pas lu de roman d’Arto Paasilinna et j’ai retrouvé avec plaisir l’univers décalé de l’écrivain. Dans ce roman, les dieux ancestraux des finlandais abandonnés depuis des siècles, décident de remédier à la situation en suivant l’exemple du dieu des chrétiens. Rutja, fils du dieu de l’orage se retrouve donc sur terre bien décidé à ramener les brebis égarées vers les anciens cultes. Pour le guider dans sa tâche il utilise la Bible tel un mode d’emploi.

L’effet comique est bien sûr assuré par le personnage de Rutja, dieu incarné qui découvre les contraintes physiques de la condition de mortel : manger, dormir, déféquer,… Ce personnage au caractère fort, parfois violent, ne ressemble pas tellement à ceux que l’on rencontre habituellement chez Paasilinna. Sampsa, l’antiquaire dont le corps sert de réceptacle au dieu, est par contre typique des héros de Paasilinna : un homme simple, en décalage avec un entourage profiteur. 

C’est un conte rocambolesque qui sous l’apparence du burlesque aborde les thèmes plus sérieux de la perte des traditions et de la place de la religion dans la société. Un petit moment plaisant mais qui ne marque pas forcément la mémoire.



Extrait :

« Si Jésus était apparu sur terre à l’époque actuelle, on ne l’aurait sans doute pas crucifié. Il aurait pu finir ses jours au bout d’une corde ou être simplement fusillé. Un milliard de personnes prieraient devant un nœud coulant ou une balle de fusil plutôt que devant un crucifix… »

Lu dans le cadre du défi Lire sous la contrainte organisé par Phildes sur le thème de la météo et dans le cadre du challenge tour du monde en 8 ans pour la Finlande

vendredi 12 décembre 2014

Entre ciel et terre - Jon Kalman Stefansson

Par Ariane

Auteur : Jon Kalman Stefansson
Titre : Entre ciel et terre
Genre : roman
Langue d’origine : islandais
Traducteur : Eric Boury
Editeur : Gallimard
Nombre de pages : 238p
Date de parution : avril 2008

Présentation de l’éditeur : 
" Certains mots sont probablement aptes à changer le monde, ils ont le pouvoir de nous consoler et de sécher nos larmes. Certains mots sont des balles de fusil, d'autres des notes de violon. Certains sont capables de faire fondre la glace qui nous enserre le cœur et il est même possible de les dépêcher comme des cohortes de sauveteurs quand les jours sont contraires et que nous ne sommes peut-être ni vivants ni morts ".
Parfois les mots font que l'on meurt de froid. Cela arrive à Bàrôur, pêcheur à la morue parti en mer sans sa vareuse. Trop occupé à retenir les vers du Paradis perdu du grand poète anglais Milton, il n'a pensé ni aux préparatifs de son équipage ni à se protéger du mauvais temps. Quand, de retour sur la terre ferme, ses camarades sortent du bateau son cadavre gelé, son meilleur ami, qui n'est pas parvenu à le sauver, entame un périlleux voyage à travers l'île pour rendre à son propriétaire, un vieux capitaine devenu aveugle, ce livre dans lequel Bàrôur s'était fatalement plongé, et pour savoir s'il a encore la force et l'envie de continuer à vivre.
Par la grâce d'une narration où chaque mot est à sa place, nous accompagnons dans son voyage initiatique un jeune pêcheur islandais qui pleure son meilleur ami : sa douleur devient la nôtre, puis son espoir aussi. Entre ciel et terre, d'une force hypnotique, nous offre une de ces lectures trop rares dont on ne sort pas indemne. Une révélation...

Mon avis : 
Étrangement je trouve parfois plus difficile de parler de mes plus belles lectures que des autres. Certaines lectures sont si magnifiques et nous donnent tant qu’il est difficile de trouver les mots pour en parler.
Même si j’avais lu de nombreuses critiques élogieuses de ce roman je craignais un peu une lecture âpre et plate. Bien au contraire, la plume de Jon Kalman est riche et séduisante. Le rythme en est très particulier avec ces phrases très (très) longues. Mais cette longueur donne justement un rythme très particulier et envoûtant. Le style est très original et cette originalité, bien qu’un peu déconcertante au départ, est finalement très poétique.
Les personnages sont magnifiques : Bardur (ou Barour l'écriture diffère selon les sources, dans le livre ce prénom est écrit à l'islandaise mais je ne possède pas de clavier adapté) ce pêcheur à l’esprit si plein de poésie qu’il en oublie sa vareuse, seul rempart contre le froid mordant ; Pétur le capitaine du bateau(la scène magnifique de cet homme chantant dans le silence de la mer, un chant puissant à la « force immémoriale »), Andrea figure maternelle pour « ses »hommes mais qui n’en reste pas moins femme, Geirprudur en bute aux préjugés de ses voisins mais qui n’en a que faire,… Et j’en oublie. Des hommes et des femmes aussi rudes que la terre d’Islande. Mais qui, comme elle, cachent des beautés insoupçonnées.
L’Islande d’ailleurs est magnifique sous la plume de Jon Kalman Stefanson. La nature y est sauvage et magnifique, froide et superbe. Les personnages sont ici à la merci de la nature. La mer, la montagne et la neige tiennent les rênes du destin des hommes.
J’aime beaucoup le titre « entre ciel et terre » qui sans la nommer rend hommage à la mer, qui n’est plus la terre mais qui n’est pas non plus le ciel. Sur la mer, les hommes sont dans un autre monde, entre ciel et terre.
La vie, la mort, la quête de soi,… ce sont des thèmes que l’on retrouve très fréquemment en littérature mais que Jon Kalman Stefansson aborde avec beaucoup de justesse.
C’est beau.
Un énorme coup de cœur, une lecture qui me hantera longtemps et que je pense conseiller à de nombreuses personnes. Je vais m’empresser d’emprunter à ma bibliothèque préférée un autre roman de cet auteur.

Extrait :
« Il est peu de choses aussi belles que la mer par une magnifique journée ou par une nuit limpide, quand elle rêve et que le clair de lune est la somme de ses rêves. Pourtant, la mer n’a nulle beauté et nous la haïssons plus que tout quand elle élève ses vagues à des dizaines de mètres au-dessus de la barque, au moment où la déferlante la submerge et nous noie comme de misérables chiots, peu importe à quel point nous agitons nos bras, implorons Dieu et Jésus-Christ, elle nous noie comme de misérables chiots. Et là, tous sont égaux. Les crapules et les justes, les colosses et les mauviettes, les bienheureux et les affligés. On entend quelques cris, quelques mains s’agitent désespérément, puis c’est comme si nous n’avions jamais existé, le corps sans vie coule, le sang se refroidit à l’intérieur, les souvenirs s’effacent, des poissons viennent se coller à ces lèvres qui, embrassées hier, prononçaient les paroles essentielles ; ils effleurent ces épaules qui portaient le benjamin et les yeux ne contemplent plus rien, posés au fond de l’eau. La mer est d’un bleu froid et jamais calme, un monstre gigantesque qui inspire, nous porte la plupart du temps, mais parfois se dérobe et alors, nous sombrons : l’histoire de l’homme n’est pas si complexe que cela. »

Lu dans le cadre du challenge Le tour du monde en 8 ans
L'avis de Jostein, Papillon,

samedi 6 décembre 2014

Cent ans - Herbjorg Wassmo

Par Ariane



Auteur : Herbjorg Wassmo

Titre : Cent ans

Genre : roman

Langue d’origine : norvégien

Traducteur : Luce Hinsch

Editeur : Gaïa

Nombre de pages : 557p

Date de parution : février 2011


Présentation de l’éditeur : 
Cent ans retrace la vie de plusieurs générations de femmes. Celle de Sara Susanne, de sa fille Elida, et de sa petite-fille, Hjørdis. On y découvre les hommes qu'elles ont voulus, ceux qu'elles ont eus et les nombreux enfants auxquels elles ont donné naissance. La petite Herbjørg, elle, appartient à la quatrième génération de la famille. Son histoire est celle d'une fillette qui se cache dans une grange pour échapper à son regard à lui. Elle possède un carnet et un crayon jaune qu'elle taille avec un petit canif. Sa seule issue est d'écrire pour mieux gommer les embûches trop tôt tendues par la vie. Et filer vers l'avenir comme on grimpe aux arbres pour approcher les oiseaux.

Mon avis : 
Herbjorg Wassmo nous offre une magnifique fresque familiale au féminin. Il ne s’agit toutefois pas d’une multibiographie mais d’une fiction, l’auteure invente et imagine ce qu’ont pu être les existences, les rêves et les espoirs des femmes de sa famille.
Quatre femmes, quatre générations qui se succèdent :  Sara Susanne qui épouse un homme qu’elle connait à peine et qu’elle finira par aimer, Elida qui à dix-huit ans à peine épouse celui qu’elle aime passionnément, Hjordis qui comprendra très vite que l’homme dont elle est tombée amoureuse n’est pas celui qu’elle croyait, Herbjorg petite fille au lourd secret.
J’ai trouvé les personnages très justes et la plupart du temps attachants. Ces femmes soumises à leur époque et à leur destin, dévouées à leurs maris et à leurs enfants, s’oubliant totalement, renonçant à leurs rêves, travaillant sans relâche, enchaînant grossesse sur grossesse (douze enfants pour Sara Susanne, et dix pour Elida tout de même !). J’ai été particulièrement touchée par le personnage d’Elida.
Si les personnages féminins sont très marqués, les personnages masculins ne sont pas oubliés. Père, frères, fils et maris chaque personnage à sa manière se fait aimer :  Johannes le courageux, Fredrik à la santé fragile, le pasteur Jensen (qui peindra le retable de la cathédrale de Kabelvag avec Sara Susanne pour modèle),…
Herbjorg ne livre jamais explicitement son secret. Mais ses silences en disent assez. Sa peur, sa colère et sa haine de celui qu’elle n’appelle jamais Papa mais seulement lui, en disent assez long. Ce père d’ailleurs, présent tout au long des passages consacrés à l’enfance de Herbjorg, mais toujours comme une ombre qui plane autour d’elle, l’enfermant dans la honte et la souffrance. Ce personnage nous le découvrons à la toute fin du récit, dans les passages consacrés à la rencontre de Hjordis (la mère) et de Hans (lui). Il apparaît alors comme un jeune homme plutôt sympathique et charmant, amusant et amoureux de la jeune femme qu’il vient de rencontrer. Il y a un tel décalage entre ce jeune homme et lui, que c’en est effrayant.
Sous la plume d’Herbjorg Wassmo, la Norvège apparaît si belle et si vivante malgré la rudesse du climat. A tel point que j’avais l’impression de sentir le froid ! (ou alors j’ai un problème de chauffage à la maison). Un pur bonheur pour moi qui rêve de ce pays depuis toujours.
C’était ma première lecture de cette auteure et j’ai été totalement séduite.

Extrait : 
« La veille elle avait décidé de ne pas pleurer au moment où l’on viendrait chercher les enfants. Leur malheur était déjà assez grand comme ça. Quelques prières l’aidèrent peut-être, car elle arriva à se contenir une bonne partie de la nuit. Mais quand elle fut certaine que Fredrik dormait enfin, elle se leva, sortit et descendit jusqu’au bord de la mer. Là, enfin seule, elle put appuyer sa tête sur un maigre tronc de saule qui n’avait pas encore de bourgeons.
Puis, par des coups de pieds, elle envoya dans l’eau quelques pierres. Jusqu’à ce que l’odeur de la marée montante envahisse ses narines. Cette odeur d’algues pourrissantes et glacées et d’eau stagnante dans les fissures des roches lui vint curieusement en aide. Elle se souvint alors que c’était justement cette odeur, cette sale odeur, qui lui avait donné l’envie de s’en aller. Et tandis qu’elle était là dans la clarté de cette nuit froide, laissant le vent défaire sa natte et ses cheveux se déployer pour personne, séchant ses larmes, heureuse que personne ne la voie, elle prit une décision ? Ils allaient y arriver. Fredrik allait guérir. Et elle allait enfin voir et entendre autre chose que le téléphone sur le mur à Rosenhaug. Tout serait pour le mieux. »

Lu dans le cadre du challenge Le tour du monde en 8 ans

L'avis de Mimi, Keisha, Kathel,