mardi 17 novembre 2020

Le tailleur de Relizane - Olivia Elkaim

Par Ariane


Auteur : Olivia Elkaim

Titre : Le tailleur de Relizane

Genre : roman

Langue d’origine : français

Editeur : Stock

Nombre de pages : 352p

Date de parution : août 2020

 

Mon avis :

Alors qu’elle vit une période charnière de son histoire personnelle, un exil intérieur explique-t-elle, Olivia Elkaim part en quête de son histoire familiale, ressuscitant la mémoire d’un autre exil. Cet exil c’est l’histoire de Marcel et Viviane qui comme tant d’autres ont quitté l’Algérie lors de ce que l’on appelait alors « les événements ».

Partant d’un épisode mystérieux de la vie de son grand-père, Olivia Elkaim reconstitue l’histoire de sa famille. Que s’est-il passé lors de ces quelques jours de 1958, où Marcel a disparu en pleine nuit emmené par des hommes armés ? Il ne le dira pas malgré l’insistance de sa femme.

Les Elkaim sont des juifs d’Algérie. Installés là des siècles avant l’arrivée des français, ils sont naturalisés par le décret Crémieux en 1870. Lorsqu’ils sont obligés de quitter l’Algérie, les Elkaim, sont citoyens d’un pays qu’ils ne connaissent pas, étrangers à celui qui les a vus naître. Paradoxe.

Olivia Elkaim explore avec subtilité les blessures encore béantes laissées par la guerre d’Algérie, guerre qui ne disait pas son nom à l’époque. Blessures de ceux qui ont dû quitter leur terre et abandonner tous leurs souvenirs. Blessures de ceux qui se sont battus pour l’indépendance de leur pays et ont été qualifiés de terroristes. Blessures de tous ces jeunes hommes à qui l’on a collé un fusil entre les mains en leur ordonnant de défendre une terre qui leur était étrangère. Presque 60 ans plus tard, la guerre d’Algérie est toujours là. Une chape de plomb pèse sur cette époque. Mais la parole commence à se libérer et des livres comme celui-ci y contribuent.

Au-delà de la quête familiale, Olivia Elkaim se livre à une quête personnelle. Elle se cherche en partant à la rencontre de l’histoire des siens. Elle se cherche pour s’affirmer et ressentir, enfin, la fierté de se dire d’origine algérienne.

C’est un bel hommage à ses grands-parents, notamment à Marce. Elle nous présente.un homme simple et bon, très attachant. J’ai particulièrement été touchée par la très jolie relation qu’il tisse avec Reda son jeune apprenti.

Comme Alice Zeniter ou Leila Slimani, Olivia Elkaim nous offre son histoire familiale, en un geste de libération et de réconciliation. C’est un très joli livre que je pense offrir à mon père, qui porte aussi en lui une blessure béante dont il ne parle jamais...

 

Extraits :

« Ça voulait dire quoi, être français, être algérien ?

Marcel n’avait pas beaucoup d’instruction, il ne lisait jamais de livres. Ecrits trop petit, phrases trop longues… Il ne comprenait pas tous les mots. Mais ces questions-là le taraudaient en silence. »

 

« Marcel fulmine.

On demande à des Français, des « qui n’ont jamais posé un orteil dans un seul de nos départements », de s’exprimer sur un sujet qui le concerne, lui, sa famille, la communauté juive, les Européens installés ici, depuis des générations, et qui ont contribué, malgré la chiasse et la malaria, à la prospérité de cette terre.

Qu’est-ce qu’ils en savent en métropole ? Et à la Guadeloupe, à la Réunion, invitées à voter elles aussi ? »

6 commentaires:

  1. J'espère que ton père aimera ce roman.

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  2. Il y a tellement de non-dit concernant la guerre d'Algérie. L'historienne Raphaëlle Branche vient d'ailleurs de sortir un essai passionnant sur le sujet dont le titre est on ne peut plus clair :"Papa, qu'as-tu fait en Algérie ?"

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  3. Je suis de Relizane et le titre m'attiré ... Je n'ai pas lu le roman, mais je trouve que c'est beau.seulement de ma lecture de l'introduction ... Si ton père était vivant dis lui où il habitait exactement,S'il voulait je pourrais lui envoyer des photos de sa maison et du lieu de couture de son père ... pour lui rappeler ses souvenirs d'enfance

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