lundi 16 février 2015

Les insurrections singulières - Jeanne Benameur

Par Daphné
















Auteur :Jeanne Benameur
Titre : Les insurrections singulières
Genre : roman
Langue d’origine : français
Editeur : Babel
Nombre de pages : 228
Date de parution : 2013

Résumé de l'éditeur:


Décalé à l’usine comme parmi les siens, Antoine flotte dans sa peau et son identité, à la recherche d’une place dans le monde. Entre vertiges d’une rupture amoureuse et limites du militantisme syndical face à la mondialisation, il lui faudra se risquer au plus profond de lui-même pour découvrir une force nouvelle, reprendre les commandes de sa vie.

Parcours de lutte et de rébellion, plongée au coeur de l’héritage familial, aventure politique intime et chronique d’une rédemption amoureuse, Les Insurrections singulières est un roman des corps en mouvement, un voyage initiatique qui nous entraîne jusqu’au Brésil.

Mon avis:

La "rage": c'est sans doute le mot qui d'après moi, pourrait le mieux résumer ce roman. Un roman sous fond de rage. Antoine a la rage contre sa vie, contre la société, contre ses conditions de travail à l'usine, contre son histoire d'amour qui vient de se terminer, conte lui-même, contre tout: 
"Je ne tourne pas rond.
 C'est dans mon corps. 
C'est dans ma tête.
Elle est là, ma rage depuis que je suis tout petit, dans le pavillond e mes parents. Les degrés de l'échelle sociale à grimper, je n'en ai rien à foutre. C'est ce qui se passe entre mon corps et le monde qui m'occupe. Depuis toujours. C'est ça qui ne va pas. 
Un décalage. 
Quelque chose en moi se lève à nouveau. Une vague immense. La phrase de l'enfance: c'est pas juste.
Non, c'est pas juste.
C'est ma vie qui n'est pas juste."

Cette rage, Antoine ne sait l'exprimer que par les mots qu'il prononce devant ses collègues, mots de rébellion, mots de lutte,mots pour défendre la classe ouvrière.  Mais dans sa vie personnelle, les mots ne viennent pas. Il ne sait pas exprimer ce qu'il ressent et sans doute est en grande partie ce qui a mis un terme à son histoire avec Karima. Karima dont il s'est séparé, à qui il pense toujours. Karima qui attendait les mots qui ne sont jamais venus. 

Après sa rupture, Antoine est contraint de revenir vivre chez ses parents. Et là non plus il ne se sent pas à sa place. Pas plus à sa place que lorsqu'il avait huit ans et qu'il a voulu fuir la maison familiale. 

Trouver sa place. Tel est le véritable thème de ce roman. Comment trouver sa place en ce monde? Comment se sentir bien quand la passion dans la vie n'est pas là, quand on lutte pour exister dans son travail comme dans la vie quotidienne? Comment trouver sa place face à la délocalisation , à la solitude? Comment vivre dans un monde où l'on ne trouve sa place ni dans sa famille, ni sur son lieu de travail, ni avec l'être aimé?

Cette place, Antoine va aller jusqu'au Brésil pour la trouver. au Brésil où l'usine dans laquelle il travaille va être délocalisée. Il ira donc au Brésil accompagné de Marcel, voisin et ami de ses parents, amoureux des livres. Et là, à l'autre bout du monde, peut être trouvera t il ce qu'il cherche. Peut être se trouvera t il lui même. 

J'ai particulièrement aimé la première partie du livre, les questionnements d’Antoine, cette quête de lui-même, cette rage qui lui mange le cœur, ce décalage qu'il sait si bien exprimer en pensées à défaut de l'exprimer par des mots. Le personnage d'Antoine m'a touché et m'a particulièrement rappelé une personne proche de mon entourage.

J'ai beaucoup aimé la manière dont Antoine personnalise l'usine en l'appelant "Lusine", dérivé de "Mélusine", la fée du célèbre conte.

En revanche, j'ai été moins touchée par la deuxième partie du livre.  Avec le départ d'Antoine pour le Brésil, j'ai eu l'impression de changer totalement de style, d'univers, d'histoire. Certes, ce changement va avec le changement de pays, de culture, le fait qu'antoine ait décidé de changer de vie mais j'ai trouvé ce changement trop brusque, comme si d'un seul coup, j'avais refermé un livre sans en connaître la fin pour en ouvrir un autre dont je n'avais pas lu le début. Étrange impression. 

Malgré cela, ce livre est resté pour moi une très bonne lecture. Si Antoine ne sait pas exprimer ses sentiments, l'auteur, elle, trouve les mots justes pour nous transmettre ce que ressent son personnage. J'ai apprécié cette écriture franche, à la fois poétique, tendre et rageuse.



Extrait:

"Et Loïc et Karima qui triment pour que les mômes aient du plaisir à apprendre...pour quoi faire après? Il a raison, Frank, quand il dit qu'on voit bien qu'il n'y a plus d'exemple à donner parce que nos vies sont traitées comme rien. J'ai envie de gueuler mais ouvrez leur les yeux, aux gosses, bon Dieu, tant qu'ils ont encore envie d'horizons, apprenez leur plutôt à se révolter, à chercher leur place dans le monde, pas à prendre juste celle qu'on leur attribue, à la louche, allez hop, toi ici, toi là!"



5 commentaires:

  1. C'est amusant, à travers ce que tu en dis j'ai l'impression que la seconde partie me tenterait plus que la première.
    Ariane

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  2. J'ai moins adhéré à la deuxième partie qu'à la première, mais j'ai tout de même beaucoup aimé cette lecture.

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  3. Un Benameur que je me garde au chaud, comme quelques autres. Une auteure aussi précieuse, je la déguste par petites touches ;)

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    1. Je n'avais lu qu'un seul autre livre de cette auteur, il y a plusieurs années. Mais je suis bien partante pour en découvrir d'autres!
      Daphné.

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    2. Je n'avais lu qu'un seul autre livre de cette auteur, il y a plusieurs années. Mais je suis bien partante pour en découvrir d'autres!
      Daphné.

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