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mardi 5 décembre 2017

Sucre noir - Miguel Bonnefoy

Par Ariane



Auteur : Miguel Bonnefoy

Titre : Sucre noir

Genre : roman

Langue d’origine : français

Editeur : Gallimard

Nombre de pages : 200p

Date de parution : août 2017

Présentation de l’éditeur :

Dans un village des Caraïbes, la légende d'un trésor disparu vient bouleverser l'existence de la famille Otero. À la recherche du butin du capitaine Henry Morgan, dont le navire aurait échoué dans les environs trois cents ans plus tôt, les explorateurs se succèdent. Tous, dont l'ambitieux Severo Bracamonte, vont croiser le chemin de Serena Otero, l'héritière de la plantation de cannes à sucre qui rêve à d'autres horizons.  Au fil des ans, tandis que la propriété familiale prospère, et qu'elle distille alors à profusion le meilleur rhum de la région, chacun cherche le trésor qui donnera un sens à sa vie. Mais, sur cette terre sauvage, la fatalité aux couleurs tropicales se plaît à détourner les ambitions et les désirs qui les consument.   Dans ce roman aux allures de conte philosophique, Miguel Bonnefoy réinvente la légende de l'un des plus célèbres corsaires pour nous raconter le destin d'hommes et de femmes guidés par la quête de l'amour et contrariés par les caprices de la fortune. Il nous livre aussi, dans une prose  somptueuse inspirée du réalisme magique des écrivains sud-américains, le tableau émouvant et enchanteur d'un pays dont les richesses sont autant de mirages et de maléfices.



Mon avis :

Pour la seconde fois, Miguel Bonnefoy nous offre une fable colorée et poétique, empreinte du réalisme magique propre à la littérature latino-américaine.

Dès le premier chapitre, je suis conquise par cette image folle d’un bateau perché à la cime des arbres, en plein cœur de la jungle. La vie s’y organisée, dans l’attente désespérée d’un retour sur les flots. Mais le navire finit par sombrer dans la terre comme en pleine mer. Et les siècles passent, ensevelissant le bateau et le trésor du pirate. Un village s’installe, la légende fait rêver et attire des aventuriers, comme ce Severo Bracamonte qui débarque un jour bien décidé à dénicher le trésor perdu.

Comme pour son premier roman, je suis d’abord séduite par la plume de Miguel Bonnefoy. Une écriture fluide, rythmée, visuelle et sensuelle. Il y a ensuite une histoire, plutôt un conte, métaphore de l’éternelle insatisfaction humaine, toujours avide d’un trésor insaisissable et incapable de voir la véritable richesse qui y est sous ses yeux. Et des personnages magnifiques, vibrants. Et cet hommage à cette nature foisonnante, mystérieuse et sublime, que l’homme s’acharne à détruire par avidité.

Un vrai bonheur !



Extrait :

« Imbécile. Tu seras un homme quand tu sortiras un trésor du fond de mes yeux. »


« Elle lui reprochait de ne pas être celui qu'elle avait attendu. Elle l'avait rêvé comme une illusion, comme un objet de désir, alors qu'il n'était qu'un homme. »


« Le poids du bateau déracina les arbres et l'entraîna vers l'abîme. Un nuage de poussière se leva et couvrit le ciel. Le vacarme de la chute affola les animaux. Ainsi, les marécages, les passions, les profondeurs de la nature, avalèrent si bien la frégate de Henry Morgan que l'on ne récupéra aucun vestige, et son trésor resta enfoui là, entre des morceaux de voile et le cadavre d'un pirate, conservé dans le ventre des Caraïbes. »




samedi 18 février 2017

The girls - Emma Cline

Par Ariane



Auteur : Emma Cline

Titre : The girls

Genre : roman

Langue d’origine : anglais (américain)

Traducteur : Jean Esch

Editeur : La table ronde

Nombre de pages : 336p

Date de parution : août 2016

Présentation de l’éditeur :

Nord de la Californie, fin des années 1960. Evie Boyd, quatorze ans, vit seule avec sa mère. Fille unique et mal dans sa peau, elle n'a que Connie, son amie d'enfance. Lorsqu'une dispute les sépare au début de l'été, Evie se tourne vers un groupe de filles dont la liberté, les tenues débraillées et l'atmosphère d'abandon qui les entoure la fascinent. Elle tombe sous la coupe de Suzanne, l'aînée de cette bande, et se laisse entraîner dans le cercle d'une secte et de son leader charismatique, Russell. Caché dans les collines, leur ranch est aussi étrange que délabré, mais, aux yeux de l'adolescente, il est exotique, électrique, et elle veut à tout prix s'y faire accepter. Tandis qu'elle passe de moins en moins de temps chez sa mère et que son obsession pour Suzanne va grandissant, Evie ne s'aperçoit pas qu'elle s'approche inéluctablement d'une violence impensable.



Mon avis :

Parmi la profusion de sorties de cette dernière littéraire e roman n’avait pas vraiment attiré mon attention. N’aurait été l’avis d’Eva je serai probablement passée à côté. Mais j’ai eu raison de suivre son coup de cœur.

S’inspirant de « la famille » de Charles Manson et de leurs crimes, Emma Cline met en scène l’histoire d’Evie, une adolescente ordinaire dont les parents en plein divorce ne se préoccupent pas. Livrée à elle-même, la jeune fille solitaire rencontre un groupe de jeunes filles, menées par la fascinante Suzanne, et se rapproche ainsi d’un groupe de marginaux vivant dans une ferme isolée sous l’emprise d’un certain Russel. C’est Evie elle-même qui raconte cette histoire. Une trentaine d’années, plus tard, Evie est une femme solitaire qui se remémore sa jeunesse au contact inattendu du fils d’un ami et de sa petite amie. Cette jeune fille désireuse de plaire, prête à suivre aveuglément celui qu’elle aime, à tout accepter et à tout faire, lui rappelle celle qu’elle a été.

La grande force de ce roman c’est tout d’abord le personnage d’Evie. Elle est l’incarnation parfaite de la fragilité de l’adolescence, de son besoin de reconnaissance, de sa soif d’appartenance, de l’intensité et de la complexité de ses émotions et de ses désirs. Une adolescente soumise à la puissance du groupe, à la force d’attraction de personnages charismatiques. Evie n’a pas participé au crime, mais il s’en est fallu de peu.

Le personnage de Suzanne est mystérieux, on sait peu de choses sur la jeune fille ni son passé, ni ses pensées. De Suzanne on ne connaît que l’image que s’en fait Evie, un personnage idéalisé, mais dont la froideur laisse perplexe.

Le roman porte bien son titre. Les filles sont les héroïnes, les véritables personnages du roman. Evie et Suzanne, mais également les personnages secondaires que sont les autres filles du groupe, la petite amie du père d’Evie, Sacha la jeune fille que rencontre l’Evie adulte et même la mère d’Evie. Et si les hommes sont presque des ombres dans ce roman, ils sont tous des figures plutôt négatives, exploitant la soif d’amour des filles et les manipulant pour obtenir ce qu’ils désirent. C’est un roman féministe dans une certaine mesure, dans lequel les filles sont victimes consentantes des hommes, soumises aux désirs masculins et prêtes à tout pour être aimées.

L’auteur explose littéralement l’image de légèreté des années 60. On est bien loin du flower power, ici il n’y a que crasse et violence. C’est l’envers du décor d’une époque dont l’on garde une image idéalisée et édulcorée. Et en même temps ce roman est terriblement d’actualité. Comment en effet ne pas penser à d’autres jeunes manipulés et utilisés par des hommes sans scrupules et jetés sur la voie de la violence et de la haine ?

C’est un roman magnifique, dont je garde un vif souvenir.



Extrait :

« J’aime imaginer que cela prît plus de temps que ça. Qu’il fallût me convaincre pendant des mois, me forcer la main lentement. Me courtiser avec prudence comme une amoureuse. Mais j’étais une cible enthousiaste, impatiente de m’offrir. »

D'autres avis chez Eva, Clara, Keisha, Hélène, Jostein




mardi 24 janvier 2017

Un travail comme un autre - Virginia Reeves

Par Ariane



Auteur : Virginia Reeves

Titre : Un travail comme un autre

Genre : roman

Langue d’origine : anglais (américain)

Traducteur : Carine Chichereau

Editeur : Stock

Nombre de pages : 344p

Date de parution : août 2016

Présentation de l’éditeur :

Roscoe T Martin est fasciné par cette force plus vaste que tout, plus grande que lui, qui se propage avec le nouveau siècle : l’électricité. Il s’y consacre, en fait son métier. Un travail auquel il doit pourtant renoncer lorsque Marie, sa femme, hérite de l’exploitation familiale. Année après année, la terre les trahit. Pour éviter la faillite, Roscoe a soudain l’idée de détourner une ligne électrique de l’Alabama Power. L’escroquerie fonctionne à merveille, jusqu’au jour où son branchement sauvage coûte la vie à un employé de la compagnie…



Mon avis :

C’est l’histoire d’une passion qui mène un homme à sa perte. Depuis son enfance, Roscoe est fasciné par l’électricité. Devenu électricien, marié à Marie qu’il adore et père d’un petit garçon, tout lui sourit. Mais au décès de son père, Marie hérite alors des terres familiales et convainc son mari de s’y installer pour faire tourner la ferme. Mais Roscoe n’a vraiment pas l’âme d’un fermier. Malheureux comme les pierres après avoir renoncé au métier qu’il aime tant, il est prêt à quitter sa femme pour fuir cette vie dans laquelle il ne s’épanouit pas. Jusqu’à ce qu’il ait l’idée de se raccorder à une ligne électrique et de détourner le courant pour moderniser la ferme. Malheureusement, son geste va coûter la vie à un employé de la compagnie électrique. Roscoe, ainsi que Wilson employé de la ferme l’ayant aidé, se retrouvent alors en prison.

Les courts chapitres alternent entre le passé, où l’on découvre ce qui a conduit Roscoe en prison, et présent. Roscoe est un personnage attachant. Il peine à trouver sa place dans la ferme familiale aussi bien que dans sa famille et c’est pour se sentir à nouveau utile, pour faire ce qu’il aime et s’affirmer en tant que mari et père qu’il décide un jour de détourner de l’électricité. En prison cet homme bon et cultivé se trouve confronté à des conditions de vie difficiles, à l’hostilité des autres prisonniers et à la violence des gardiens. Il trouve tout de même un peu de réconfort au chenil et à la bibliothèque, dans l’amitié que lui portent le chapelain, le bibliothécaire et le directeur adjoint. Mais c’est tout de même un homme profondément malheureux, qui n’a aucun contact avec l’extérieur depuis son arrestation car sa femme et son fils ont coupé tout lien avec lui. Il doit aussi supporter le poids de la culpabilité. En voulant bien faire il a pris la vie d’un homme, détruit sa famille et celle de Wilson, son employé lui aussi incarcéré. Mais Wilson a encore moins de chances que Roscoe, car à l’époque en Alabama, un prisonnier noir était envoyé à la mine.

C’est un bon roman, à la fois subtil et réaliste, dans lequel on retrouve quelque chose des grands noms de la littérature américaine comme Steinbeck ou Kerouac. Le talent est là, c’est indéniable, j’ai hâte de voir ce que l’auteur en fera, car il s’agit de son premier roman.



Extrait :

« On naît avec quelque chose dans les veines, pour mon père, c’était le charbon, pour Marie, c’est la ferme, pour moi, un puissant courant électrique. »

D'autres avis chez ClaraJostein,