samedi 27 février 2021

La révolution, la danse et moi - Alma Guillermoprieto

Par Ariane

 


Auteur : Alma Guillermoprieto

Titre : La révolution, la danse et mpo

Genre : récit

Langue d’origine : espagnol (Mexique)

Editeur : Marchialy

Nombre de pages : 364p

Date de parution : août 2020

 

Mon avis :

Alma Guillermoprieto est une journaliste mexicaine qui a écrit pour de nombreux journaux et revues, portant la voix de l’Amérique latine.

Mais elle n’a pas toujours voulu être journaliste. Son rêve de jeunesse était de devenir danseuse. C’est pour cela qu’elle a débarqué à New York à l’âge de 16 ans, vivotant de petits boulots pour suivre des cours et se produisant dans des spectacles d’avant-garde. Mais elle voit ses espoirs se briser lorsque Merce Cunningham la recommande pour un poste de professeur de danse à Cuba. Elle débarque sur l’île à 20 ans pour enseigner à des élèves à peine moins âgés qu’elle. Elle découvre les conditions de vie des cubains, l’euphorie révolutionnaire toujours présente et se laisse petit à petit gagner par l’effervescence ambiante.

Alma Guillermoprieto partage avec nous ses souvenirs et réflexions sur ces quelques mois qui ont changé sa vie. C’est le récit initiatique de l’éveil d’une conscience politique. J’ai trouvé vraiment intéressante cette immersion dans le quotidien des cubains de l’époque, cette effervescence et cet espoir aussi touchant que tragique. En revanche, j’ai beaucoup moins adhéré aux passages consacrés à la danse. Il faut dire que si j’aime regarder la danse je ne la pratique pas et les longs passages techniques sont complétement abscons pour un lecteur non initié. Enfin, j’ai trouvé le style assez lourd, de même que les interminables plaintes d’Alma sur sa situation personnelle.

Pas un coup de cœur, mais j’en retiens une lecture intéressante pour son aspect politique et social.

 

Extrait :

« Est-ce que c’est ça, l’art ? Etre touché en croyant que ce que l’on ressent nous appartient, alors qu’en fin  de compte, c’est quelqu’un d’autre qui, par son désir, nous atteint ? »

 


 

vendredi 26 février 2021

Nord-Est - Antoine Choplin

Par Daphné








Auteur : Antoine Choplin

Titre : Nord-Est
Genre : roman
Langue d’origine : français
Editeur : la fosse aux ours
Date d'édition : 2010
Nombre de pages : 192

Résumé de l'éditeur :

Des hommes et des femmes ont le choix de quitter un camp, enfin libres. Si la plupart restent sur place, d'autres, sous l'impulsion de Garri, décident de partir à pied. Ils veulent rejoindre les plaines du Nord-Est pour y reconstruire une nouvelle vie. Il leur faudra franchir des plateaux, des villages dévastés et de hautes montagnes. Le récit d'une expédition entre fable et western métaphysique.

Mon avis :

Il y a des auteurs vers qui on aime revenir, des auteurs à l'écriture douce et pleine d'humanité, quel que soit le sujet de son livre. Pour moi, Antoine Choplin fait partie de ces auteurs là. Il nous entraîne ici dans un voyage hors de tout lieu et de toute temporalité, le périple de quelques personnages, qui, ayant quitté un camp et une vie d'enfermement, se lancent à travers les chemins pour rejoindre les plaines au delà des montagnes. 

Où? Quand ? Pourquoi ?One ne le saura pas et cela n'a finalement pas tant d'importance. Ce qui compte, c'est l'ambiance, la personnalité des personnages, les descriptions... Ce qui compte, c'est cette écriture, toujours pleine de finesse, cette écriture propre à son auteur, une écriture simple et sensible, une écriture qui me touche toujours. 

Comme toujours, ce livre est plutôt court, se lit très rapidement... et comme toujours, cela suffit. Nul besoin de pages supplémentaires, on se laisse emporter et on referme le livre en attendant le suivant...

Extrait :

"L’océan des nuages est un sang visqueux et pâle écoulé partout dans les veines du paysage. Il vient échouer, deux ou trois cent mètres en dessous, sur le rempart tortueux formé par les parois et couvre les basses vallées. Au loin, d’autres montagnes pointent, comme les saillies d’un archipel. L’air est immobile. Le froid nocturne se dissipe déjà et, depuis le givre matinal de la veille, c’est une saison entière qui semble avoir passé.
Au-dessus du couvert des brumes, le ciel est pur et clair. Les oiseaux d’altitude, accenteurs, traquets motteux, merles de roche, se tiennent aux aguets d’une lumière plus franche qui gonflera bientôt leur chant."


mardi 23 février 2021

Un bref instant de splendeur - Ocean Vuong

Par Ariane


Auteur : Ocean Vuong

Titre : Un bref instant de splendeur

Genre : roman

Langue d’origine : Marguerite Capelle

Editeur : Gallimard

Nombre de pages : 304p

Date de parution : janvier 2021

 

Mon avis :

Ce roman, récit plutôt, est une longue lettre que l’auteur adresse à sa mère. Une lettre qui ne sera jamais lue, car celle-ci ne sait ni lire ni parler anglais. Rose est née au Vietnam, d’une mère vietnamienne et d’un soldat américain. Si claire de peau qu’elle passe pour une blanche jusqu’à ce qu’elle baragouine quelques mots. Son fils, surnommé Little Dog, arrivé enfant aux Etats-Unis porte un regard lucide et sensible sur sa famille.

C’est une mise à nu totale, dans laquelle le jeune homme déroule leur histoire marquée par la violence de cette mère aimante mais traumatisée par un passé trop lourd à porter. Il raconte son enfance et son adolescence, la quête d’identité de celui qui grandit entre deux cultures, deux langues. Mais aussi l’apprentissage du désir et de la sexualité.

A la fois cru et poétique, délicat et brutal, ce texte cathartique révèle passages magnifiques, où la langue s’envole et touche le lecteur en plein cœur. Quelques mots d’une perfection absolue. Des scènes touchant au sublime.

Mais pourtant… Malgré cette beauté de l’écriture, malgré ces passages incroyables, malgré la sincérité du propos, je suis loin du coup de cœur. Pourquoi ? Difficile à dire, mais j’ai eu le sentiment d’un texte trop recherché, trop réfléchi. Un projet littéraire, qui bien qu’intimiste, fait parfois penser à un exercice de style.

 

Extrait :

« Je repense à la liberté, et que le moment où le veau est le plus libre est celui où la cage s'ouvre, et où on le conduit au camion pour l'abattre. »

« J'avais envie de pleurer mais je ne savais pas encore le faire en anglais. Alors je n'ai rien fait. »

« En vietnamien, on utilise le même mot pour dire que quelqu'un nous manque ou que vous vous souvenez de lui : nhớ. Parfois, quand tu me demandes au téléphone : Có nhớ mẹ không? je tressaille, croyant que tu as voulu dire : Tu te souviens de moi ?
Tu me manques davantage que je ne me souviens de toi. »

« Si la vie d'un individu, comparée à l'histoire de notre planète, est infiniment courte, un battement de cils, comme on dit, alors être magnifique, même du jour de votre naissance au jour de votre mort, c'est ne connaître qu'un bref instant de splendeur. »

« Petite fille, tu as regardé, depuis une bananeraie, ton école s'écrouler après une attaque américaine au napalm. À cinq ans, tu n'as plus jamais remis les pieds dans une salle de classe. Notre langue maternelle n'a donc rien d'une mère : c'est une orpheline. Notre vietnamien est une capsule temporelle, qui marque la fin de ton éducation, réduite en cendres. Maman, s'exprimer dans notre langue maternelle, c'est parler seulement partiellement en vietnamien, mais entièrement en guerre. »

« Ils voudront que tu réussisses, mais jamais davantage qu’eux. Ils écriront leurs noms sur ta laisse et diront que tu es nécessaire, que tu es important. »

« Est-ce que c’est ça, l’art. Etre touché en croyant que ce que l’on ressent nous appartient, alors qu’en fin de compte, c’est quelqu’un d’autre, qui par son désir, nous atteint ? »


lundi 22 février 2021

Les roses fauves - Carole Martinez

Par Daphné



 





Auteur : Carole Martinez

Titre :Les roses fauves
Genre : roman

Langue d’origine : français

Editeur : Gallimard
Nombre de pages : 352
Date de parution : 2020

Résumé de l'éditeur :

«Peu après la sortie de mon premier roman, Le cœur cousu, une lectrice m’a raconté une coutume espagnole dont j’ignorais l’existence : dans la sierra andalouse où étaient nées ses aïeules, quand une femme sentait la mort venir, elle brodait un coussin en forme de cœur qu’elle bourrait de bouts de papier sur lesquels étaient écrits ses secrets. À sa mort, sa fille aînée en héritait avec l’interdiction absolue de l’ouvrir. J’ai métamorphosé cette lectrice en personnage.
Lola vit seule au-dessus du bureau de poste où elle travaille, elle se dit comblée par son jardin. Dans son portefeuille, on ne trouve que des photos de ses fleurs et, dans sa chambre, trône une armoire de noces pleine des cœurs en tissu des femmes de sa lignée espagnole. Lola se demande si elle est faite de l’histoire familiale que ces cœurs interdits contiennent et dont elle ne sait rien. Sommes-nous écrits par ceux qui nous ont précédés?
Il faudrait déchirer ces cœurs pour le savoir…»

Mon avis :

Ayant eu de grands coups de cœur pour La terre qui penche et Le cœur cousu, et ayant bien aimé Le domaine des murmures, j'attendais avec impatience d'ouvrir ce nouveau livre de Carole Martinez. Mais même si j'ai apprécié cette lecture, ce livre-là n'est pas mon préféré et je suis restée sur un goût d'inachevé en le refermant.

Plusieurs histoires s'entremêlent ici : entre autres, celle de la narratrice, qui est sans doute aussi l'auteure elle-même (ou son double imaginaire peut-être), cherchant l'inspiration pour un nouveau roman, celle de Lola, la postière, à la fois personnage et source d'inspiration du livre de la narratrice, celle de l'arrière-grand-mère de Lola qui a écrit ses secrets dans un cœur de tissus...  

Généralement, j'aime beaucoup ce genre de construction littéraire où l'on trouve, tels des poupées russes, des histoires s'imbriquant les unes dans les autres. Cette fois, en revanche, je m'y suis un peu perdue. Autant j'ai aimé suivre l'histoire de l'arrière-grand-mère de Lola, autant j'ai moins accrochée avec les autres. Je les ai tout de même suivi avec intérêt durant une partie du roman. Une partie seulement car j'ai eu du mal avec les derniers chapitres où tout semble partir dans tous les sens. 

J'ai donc beaucoup aimé l'histoire de l'arrière-grand-mère de Lola, histoire qui part d'une coutume, la coutume des cœurs cousus voulant que chaque femme se sentant sur le point de mourir écrive ses secrets et les enferme dans un cœur de tissus qu'elle coud puis transmet à sa fille aînée, laquelle se voit interdite d'ouvrir ce cœur mais qui le conserve, conservant ainsi la mémoire de ses aïeux. On y retrouve ainsi une sorte de prolongation de son premier roman puisque celui-ci a pour titre Le cœur cousu. 

En revanche, l'idée de l'auteure de se mettre elle-même en scène ne m'a pas vraiment séduite et j'ai plusieurs fois été plutôt agacée par ses diversions sur l'écriture qui n'apportaient d'après moi pas grand chose à l'histoire. Mais ce qui m'a le plus déstabilisée, c'est le fait de clore d'un coup l'histoire de l'arrière-grand-mère pour créer une nouvelle histoire en plein milieu du roman, une histoire à laquelle on ne croit guère et qui paraît souvent tirée par les cheveux. Par ailleurs, tout au long du roman, des esquisses d'autres histoires  nous sont proposées sans être cependant approfondies, si bien qu'on se demande ce qu'elles font là alors qu'elles auraient eu le mérite d'être plus achevées.

Une déception sur l'histoire en elle-même donc, heureusement contrebalancée par le côté un peu merveilleux qui se dégage du réel, côté propre aux romans en général de Carole Martinez. Comme dans ses autres livres, j'ai aimé cette frontière un peu floue entre imaginaire et réalité. La plume de l'auteure, teintée d'un brin de poésie, sait très bien nous embarquer dans ce monde-là. 

Au final, j'ai trouvé de nombreuses qualités à ce roman et ai passé un bon moment en le lisant mais il est certain que j'ai préféré les autres livres de Carole Martinez à celui-ci.

Extrait :

"Un roman n'est pas un mensonge, puisqu'il ne se présente pas comme la vérité, même s'il s'en donne les apparences. Il peut pourtant contenir plus de réalité qu'un témoignage, permettre de toucher à l'intime, de dire ce qui ne saurait être dit autrement."

samedi 20 février 2021

Contagion - Lawrence Wright

Par Ariane



Auteur : Lawrence Wright

Titre : Contagion

Genre : thriller

Langue d’origine : anglais (Etats-Unis)

Traducteur : Laurent Barucq

Editeur : Le cherche midi

Nombre de pages : 480p

Date de parution : octobre 2020

 

Mon avis :

Une mystérieuse maladie respiratoire apparue en Asie se répand à travers le monde… Si ce scénario de film catastrophe est devenu réalité, la ressemblance avec l’épidémie racontée par Lawrence Wright dans ce roman s’arrête là.

Henry Parsons, épidémiologiste renommé, est envoyé en Indonésie par l’OMS. Quarante-sept personnes sont mortes d’une fièvre mystérieuse dans un camp de prisonniers. Il comprend rapidement la gravité de la menace, d’autant qu’un chauffeur de taxi entré dans le camp et possiblement porteur du virus, est parti en pèlerinage à La Mecque.

Ce roman, entre thriller et anticipation, est un véritable page turner. On ne s’ennuie pas, le rythme est soutenu et efficace. D’autant plus que l’auteur, journaliste, s’appuie sur une solide documentation scientifique et géopolitique. Mais Contagion souffre aussi des défauts récurrents du genre : efficace certes, mais sans intérêt sur le plan littéraire. La construction de l’intrigue est assez classique et sans surprise. Bien que le personnage principal soit bien différent des héros que l’on retrouve en général dans ce genre de romans (ou films). Henry Parsons est un petit homme, souffrant de handicaps et de malformations physiques, brillant scientifique et heureux mari et père. Même si son passé cache quelques zones d’ombre.

Le retentissement qu’a connu ce roman, tient principalement au hasard de sa sortie aux Etats-Unis, en avril, alors même que l’épidémie de COVID 19 s’était répandue le monde entier, confinant des millions de personnes, figeant le monde dans un instant d’incertitude et d’angoisse. La mise en abîme entre le roman et la réalité est assez perturbante, même si la version imaginée par Lawrence Wright est plus terrible. A éviter pour les plus anxieux…