mercredi 29 novembre 2017

Mercredi, c'est le jour des petits : Le noir quart d'heure - Carl Norac et Emmanuelle Eeckhout

Par Ariane


Auteur : Carl Norac
Illustrateur : Emmanuelle Eeckhout
Titre : Le noir quart d'heure
Editeur : L'école des loisirs

Présentation de l'éditeur :
Le noir quart d’heure, c’est Maman et moi, tout éteint. Maman allume une bougie. On se fait une dernière grimace, puis un sourire. 12, 11, 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1 ! On souffle, et c’est parti pour le noir quart d’heure ! Elle raconte, je raconte. C’est notre histoire.



Mon avis :
C'est l'album idéal à lire avant d'aller au lit. Tout en douceur, tendresse et poésie.
La maman de l'histoire et sa petite fille ont une tradition le soir. Plutôt que de lire un livre, elles éteignent la lumière et laissent vagabonder leur imagination. Ensemble elles imaginent et rêvent, pendant que le père, mineur, rentre à la maison. 
Les illustrations, dans un dégradé de noir et gris, sont éclairées par la lumière des étoiles et de la lune, la blancheur de la neige ou du pelage d'un ours blanc. 
C'est très joli et délicat, et après l'avoir refermé, comment ne pas imiter les personnages du livre ? Alors on éteint la lumière et on rêve ensemble.

mardi 28 novembre 2017

La servante écarlate - Margaret Atwood

Par Ariane



Auteur : Margaret Atwood

Titre : La servante écarlate

Genre : roman

Langue d’origine : anglais (Canada)

Traducteur : Sylvianne Rué

Editeur : Robert Laffont

Nombre de pages : 544p

Date de parution : juin 2017 (1ère parution 1985)

Présentation de l’éditeur :

Devant la chute drastique de la fécondité, la république de Gilead, récemment fondée par des fanatiques religieux, a réduit au rang d'esclaves sexuelles les quelques femmes encore fertiles. Vêtue de rouge, Defred, « servante écarlate » parmi d'autres, à qui l'on a ôté jusqu'à son nom, met donc son corps au service de son Commandant et de son épouse. Le soir, en regagnant sa chambre à l'austérité monacale, elle songe au temps où les femmes avaient le droit de lire, de travailler... En rejoignant un réseau secret, elle va tout tenter pour recouvrer sa liberté. Paru pour la première fois en 1985, La Servante écarlate s'est vendu à des millions d'exemplaires à travers le monde. Devenu un classique de la littérature anglophone, ce roman, qui n'est pas sans évoquer le 1984 de George Orwell, décrit un quotidien glaçant qui n'a jamais semblé aussi proche, nous rappelant combien fragiles sont nos libertés. La série adaptée de ce chef-d'oeuvre de Margaret Atwood, diffusée sous le titre original The Handmaid's Tale, avec Elisabeth Moss dans le rôle principal, a été unanimement saluée par la critique.


Mon avis :

Laure et mois poursuivons notre tour d’horizon de la littérature post-apocalyptique avec ce roman de Margaret Atwood paru en 1985 et qui connaît un nouveau succès depuis son adaptation en série télévisée.

Quelques années plus tôt, des fanatiques religieux ont renversé le gouvernement et fondé la république de Gilead. Désormais tout est contrôlé, encadré et notamment les femmes. Elles sont Epouse, Martha, Tante ou Servante et assignées à un rôle spécifique. Les Servantes, rares femmes encore fertiles, ont pour seule mission de faire des enfants. Defred est l’une de ces femmes. Elle nous raconte sa vie en tant que Servante ainsi que ses souvenirs du monde d’avant. Ceux d’une jeune femme ordinaire, mariée et mère d’une petite fille.

Ce roman m’a été conseillé dans le cadre de mes lectures post-apocalyptiques, mais il s’agit plutôt d’une dystopie.  Et j’ai souvent du mal avec les dystopies que je trouve rarement crédibles. Peut-être aussi cela m’arrange-t-il de me dire que rien de tel ne pourrait arriver. Car la vie dans la république de Gilead est terrifiante, en particulier quand on est femme. Et pourtant… le pouvoir confisqué par des fanatiques, un contrôle total de la société, l’asservissement des femmes, la délation, l’oppression, la répression… Cela c’est déjà vu. La facilité avec cela c’est passé est déconcertante, de même que la passivité avec laquelle les gens ont accepté ce nouveau mode de vie. Mais là encore, les précédents sont nombreux. C’est sans doute ce qui m’a le plus intéressée dans l’histoire de Defred et de Gilead, cette piqûre de rappel sur la fragilité d’un monde que nous pensons immuable.

A Gilead les femmes n’ont plus aucune liberté, plus aucune distraction n’est autorisée, plus aucun choix n’est possible. Elles ne peuvent travailler, ni rien posséder, elles ne peuvent plus maîtriser leur destin et se voient réduites à une seule fonction, toujours au service des hommes : Epouse, Martha pour la cuisine et le ménage, Servante pour la reproduction. Et ces dernières sont sans doute les plus mal loties de toutes, elles à qui on a arraché leur enfant, soumises à des viols rituels, enlevé jusqu’à leur nom en les rebaptisant du nom de l’homme qu’elles doivent servir (Defred, c’est-à-dire la servante de Fred).

Le récit de Defred est étonnamment détaché, peut-être parce que les émotions sont dangereuses pour elle, un luxe qu’elle ne peut se permettre. Malgré son détachement, on sent sourdre la révolte et la colère de Defred.

Une lecture très intéressante sur la condition féminine et l’intégrisme religieux.



Extraits :

« Notre fonction est la reproduction : nous ne sommes pas des concubines, des geishas ni des courtisanes. Au contraire : tout a été fait pour nous éliminer de ces catégories. Rien en nous ne doit séduire, aucune latitude n’est autorisée pour que fleurissent des désirs secrets, nulle faveur particulière ne doit être extorquée par des cajoleries, ni de part ni d’autre ; l’amour ne doit trouver aucune prise. Nous sommes des utérus à deux pattes, un point c’est tout : vases sacrés, calices ambulants. »


« Il y a beaucoup de choses auxquelles il n'est pas supportable de penser. Penser peut nuire à nos chances, et j'ai l'intention de durer. »


« Un homme stérile, ça n’existe plus, du moins officiellement. Il y a seulement des femmes qui sont fertiles et des femmes improductives, c’est la loi. »

L'avis de Laure avec qui j'ai partagé cette lecture

D'autres avis chez Violette, Jostein


lundi 27 novembre 2017

Sonia - Ignacy Karpowicz

Par Daphné




















Auteur : Ignacy Karpowicz
Titre : Sonia
Genre : roman
Langue d’origine : polonais

Traductrice : Caroline Raszka-Dewez
Editeur : Noir sur Blanc

Nombre de pages : 177
date d'édition : 2014
Résumé de l'éditeur :

Un chiffon ensanglanté et un vieux chien au collier marqué de lettres gothiques, une histoire perdue dans la plus terrible des guerres, une histoire de haine et d’humiliation, mais avant tout une histoire de désir et d’amour interdit, puissant, inconcevable, qui fait fi de tout le reste.La Mercedes d’un jeune metteur en scène de Varsovie, Igor Grycowski, tombe en panne à l’entrée d’un hameau de Podlachie. Sonia, une petite vieille dont l’unique fortune est une vache, invite l’étranger dans sa chaumière, lui verse du lait et se met à lui raconter sa vie. Igor saisit en un éclair que le destin de Sonia offre la matière d’une pièce sur le grand, l’impossible amour. Sonia a grandi sans sa mère, elle a été battue et violée par son père, forcée comme une bête aux travaux domestiques. De la sueur, des larmes et du sang, jusqu’à l’arrivée des Allemands dans son village en juin 1941… Mais il apparaît peu à peu que l’histoire de cette passion ne nous parvient pas directement : Igor la traduit à mesure, et surtout il lui applique le langage et les formes du théâtre à la mode. Le lecteur se méfie – c’est bien ce qu’attend de lui Ignacy Karpowicz.


Mon avis :

Merci d'abord à Edyta pour m'avoir fait découvrir ce livre, "livre volant"qui, si vous le souhaitez, pourra atterrir dans votre boîte aux lettres!

Sonia est l'histoire d'une femme, l'histoire d'un amour mais un amour sans lendemain, un amour sans espoir, un amour contre l'Histoire, un amour contre la guerre. Un amour terrible, honteux et douloureux. Sonia arrive à la fin de sa vie lorsqu'elle prend enfin la parole pour raconter cet amour. Et c'est à Igor Grycowski, metteur en scène, qu'elle le raconte. De cette histoire, il fera une pièce...

J'ai d'abord été déstabilisée par la construction du récit qui passe tantôt des souvenirs de Sonia aux scènes de la pièce, mêlant témoignage et adaptation parfois avec une transition si discrète que je ne savais plus trop où j'en étais et me devait de faire une retour de quelques pages en arrières. Démêler le vrai du faux, la parole donnée de la parole retranscrite, tel semble être le piège dans lequel l'auteur veut nous attirer et cela pose question sur les véritables retranscriptions des récits historiques. Même s'il s'agit là d'un roman, on ne peut s'empêcher de se demander, en lisant ces pages, quel est le degré de transformation de certains témoignages.

Certains passages sont durs à lire, tranches de vies de Sonia mais également moments de l'Histoire. On se retrouve plongé en Pologne au moment de la seconde guerre mondiale et l'auteur nous décrit parfaitement l'ambiance qui y règne. L'écriture est puissante, imagée et je n'ai eu aucun mal à imaginer Sonia et son "visage comme on n'en fait plus" et le monde qui l'entoure. De même que l'on passe du récit de Sonia à la pièce d'Igor Grycowsky, on oscille sans arrêt entre beauté et violence, horreur et douceur... car il y a de la beauté dans ce livre malgré sa dureté, la beauté d'un amour, impossible cruel mais beau dans la manière dont les personnages s'y perdent et y croient, de la beauté dans le personnage de Micha, le mari de Sonia dont le dévouement et la lucidité m'a beaucoup touchée, de la beauté dans l'écriture...

Un livre fort, qui ne laisse pas indifférent.

Extrait :

" Je regardais le ciel. Je regardais la voûte aux millions d'étoiles. Je priais : Mon Haspodz, tu possèdes des millions d'étoiles, donne m'en une, la plus petite, fais la tomber avec ton doigt ou en éternuant, et je ferai un vœu. Une seule étoile, la plus petite, elle peut bien être cabossée, je t'en supplie, donne moi une étoile" 

vendredi 24 novembre 2017

3000 façons de dire je t'aime - Marie-Aude Murail

Par Daphné















Auteur : Marie-Aude Murail
Titre : 3000 façons de dire je t'aime
Genre : roman jeunesse
Langue d’origine : français

Editeur : L'école des loisirs

Résumé de l'éditeur :

Chloé, Bastien et Neville ont eu en cinquième une
professeure de français qui n’aimait que les livres qui
finissent mal. Un soir, elle les a emmenés pour la première
fois au théâtre voir une représentation de Dom Juan de
Molière. Cette soirée a changé leur vie. C’est décidé, ils
seront comédiens !

Six ans plus tard, leur désir de monter sur scène est intact
et ils se retrouvent au conservatoire d’art dramatique de leur
ville. Le professeur le plus réputé, Monsieur Jeanson, les
prend tous les trois dans son cours.

Chloé va devoir concilier les cours de théâtre avec le
rythme intensif de la classe préparatoire qu’elle vient
d’intégrer. 

Bastien, prêt à tout pour faire rire, pense qu’il
suffit de regarder une vidéo de Louis de Funès pour
apprendre la tirade d’Harpagon. Le beau et ténébreux
Neville a peur de se donner les moyens de son ambition,
d’être un autre pour savoir enfin qui il est.

Comment le théâtre va-t-il lier pour toujours la jolie
jeune première, le valet de comédie et le héros romantique que Jeanson a su voir en eux ?


Mon avis :

De mon enfance et de mon adolescence, je retiens quelques lectures bien particulières. Il y a eu pour moi Le jardin secretLes enfants Tillerman, Les quatre filles du docteur March... et il y a eu les livres de Marie-Aude Murail ! Je suis tombée sur eux un jour dans le CDI de mon collège et ils m'ont accompagné durant plusieurs années : les aventures de Nils Hazard, Ma vie a changé, Oh boy! et surtout la série des Emilien.... Marie-Aude Murail était une de mes auteurs préférées et j'ai longtemps dévoré ses livres. Plusieurs fois à la bibliothèquen ces temps ci, je suis tombée à nouveau sur quelques uns de ses livres mais sans jamais les prendre : peur de la déception peut-être? Et puis l'autre jour, j'ai craqué, revenant d'un seul coup seize ou dix-sept ans en arrière... et je n'ai pas été déçue!

Chloé, Bastien et Neville n'ont apparemment rien en commun si ce n'est le fait d'être dans la même classe en 5ème. Rien en commun jusqu’au jour où leur prof de français décide d'initier ses élèves au théâtre. Six ans plus tard, aucun d'entre eux n'aura oublié cette période de leur existence et ils se retrouveront réunis au conservatoire d'art dramatique, décidés à être comédiens. Ce sera le début de leur nouvelle vie d'étudiants mais aussi d'un lien indéfectible entre eux... car le théâtre va les lier sur scène mais aussi et surtout dans la vie. 

3000 façons de dire je t'aime est une histoire de recherche, de quête. Bastien, Chloé et Neville, tout au long de ce roman se cherchent. Ils cherchent leur identité, leurs sentiments, les personnages qu'ils vont jouer. Ils cherchent leur voies, ils se cherchent eux-mêmes, se cherchent les uns les autres.  A ce parcours initiatique s'ajoute de nombreuses références théâtrales qui donnent une touche originale et pleine de charme à ce roman.

J'ai tout à fait retrouvé la plume de Marie-Aude Murail qui me plaisait tant lorsque j'étais collégienne. Elle a un véritable don pour écrire sur et pour les adolescents... et à l'âge adulte, cela continue de me plaire!


Extrait :

"Comme disait Jeanson:
-Au théâtre comme en amour, "tu peut m'ouvrir cent fois les bras, c'est toujours la première fois"."



mercredi 22 novembre 2017

Mercredi, c'est le jour des petits - Violette et ses deux papas - Emilie Chazerand et Gaëlle Souppart

Par Daphné















Auteur : Emilie Chazerand
Illustratrice : Gaëlle Souppart
Titre : Les deux papas de Violette
Editeur : Gautier Languereau


Résumé :

"C'est une maladie d'avoir deux papas ? 
_N'importe quoi, dit Violette. 
Mes papas, ils s'occupent trop bien de moi. 
Je les aime tous les deux, et puis c'est tout."

Un bel album très tendre pour évoquer tout simplement les familles homoparentales.




Mon avis :

Une maladie d'avoir deux papas? Mais pourquoi ça, se demande Violette après avoir subit des moqueries à ce sujet là dans la cour de récréation. violette a deux papas, un qui lui apprend à danser le tango et qui lui lit des histoires le soir, l'autre qui l'aide dans ses devoirs et qui la console quand elle fait des cauchemars, deux papas qui la prennent sans cesse en photo, lui font des coiffures bizarres et lui disent de manger ce qu'il y a dans son assiette... bref, deux papas qui l'aiment et qu'elle aime, deux parents comme les autres et pourtant... pourtant, ce n'est pas toujours facile pour Violette d'entendre les remarques des autres enfants, de ne pas faire des activités ou aller à la fête de l'école tous les trois parce ses papas ont peur que cela l’embarrasse.  Mais qu'est ce qui compte le plus après tout? N'est ce pas tout simplement d'avoir des parents qui l'aiment et d'être heureuse avec eux?

Violette et ses deux papas est un très joli album sur l'homoparentalité au texte simple, tout en rimes, agréable à lire et à entendre qui permet d'aborder avec simplicité l'homoparentalité et de faire la chasse aux préjugés. Les illustrations, tendres et jolies accompagnent parfaitement l'histoire.

Un livre tendre et poétique qui permet d'expliquer et de banaliser le sujet de l'homoparentalité. Quelques jours après lui avoir lu ce livre, j'ai été ravie d'entendre ma fille dans l'un de ses jeux, mettre en scène une famille avec deux papas : pour elle, cela n'a rien d'étrange et j'en suis très heureuse!

Extrait :

"Mes papas ne sortent pas d'un conte de fée.
Ils n'ont pas de bottes de sept lieues: eux, ils règlent
leurs pas sur le mien pour qu'on avance ensemble sur le chemin.
Ils me disent que je suis une étoile, une perle, un génie.
Je sais que ce n'est pas vrai, mais ça me plaît
."





mardi 21 novembre 2017

Les fantômes du vieux pays - Nathan Hill

Par Ariane



Auteur : Nathan Hill

Titre : Les fantômes du vieux pays

Genre : roman

Langue d’origine : anglais (américain)

Traducteur : Mathilde Bach

Editeur : Gallimard

Nombre de pages : 720p

Date de parution : août 2017

Présentation de l’éditeur :

Scandale aux États-Unis : le gouverneur Packer, candidat à la présidentielle, a été agressé en public. Son assaillante est une femme d'âge mûr : Faye Andresen-Anderson. Les médias s’emparent de son histoire et la surnomment Calamity Packer. Seul Samuel Anderson, professeur d’anglais à l’Université de Chicago, passe à côté du fait divers, tout occupé qu’il est à jouer en ligne au Monde d'Elfscape. Pourtant, Calamity Packer n’est autre que sa mère, qui l’a abandonné à l’âge de onze ans. Et voilà que l’éditeur de Samuel, qui lui avait versé une avance rondelette pour un roman qu’il n’a jamais écrit, menace de le poursuivre en justice. En désespoir de cause, le jeune homme lui propose un nouveau projet : un livre révélation sur sa mère qui la réduira en miettes. Samuel ne sait presque rien d’elle ; il se lance donc dans la reconstitution minutieuse de sa vie, qui dévoilera bien des surprises et réveillera son lot de fantômes.
Des émeutes de Chicago en 1968 au New York post-11-Septembre en passant par la Norvège des années quarante et le Midwest des années soixante, Nathan Hill s’empare de l’Amérique d’aujourd’hui et de ses démons et compose avec beaucoup d’humour une fresque aussi ambitieuse que captivante.



Mon avis :

Ce premier roman rencontre un franc succès et cela ne m’étonne pas. Pour un premier roman, c’est réussi.

Samuel est écrivain et professeur de littérature dans une petite université. Ou plutôt c’est un écrivain raté, incapable d’écrire quoique ce soit depuis une nouvelle prometteuse et il tente d’enseigner la littérature à des étudiants qui s’en fichent royalement. Son poste à l’université est d’ailleurs menacé à cause d’une étudiante qu’il a accusée de tricherie et ses relations avec son éditeur sont tout aussi précaires. Le dos au mur il accepte alors d’écrire un livre sur sa mère qui l’a abandonné des années plus tôt et qui fait alors la une de l’actualité après avoir jeté des cailloux sur un gouverneur conservateur. Ce sera l'occasion pour lui d’en savoir plus sur sa mère.

A partir de l’histoire de Samuel et de sa mère, l’auteur dresse une fresque des Etats-Unis sur une quarantaine d’années.  C’est une fresque assez cynique, soulignant les illusions successives de chaque génération, les magouilles de la justice et de la politique, les mensonges des médias,… Une dénonciation d’un système visant de plus en plus à uniformiser la population tout en glorifiant l’individualisme. Une société où le virtuel prend le pas sur le réel. Une société où les artistes disparaissent au profit des starlettes.  

Les personnages secondaires (Pawne et Laura) s’ils ont leur place dans l’histoire de Samuel, voient leur histoire personnelle racontée en parallèle.  Ultra-connectés, ils ont perdu tout sens de la réalité. Leurs relations humaines ont presque totalement disparu, ne laissant que des relations virtuelles et désormais vides de sens. Ce sont des personnages pitoyables et effrayants, réalistes malheureusement.

Les personnages sont nombreux tout comme les sujets abordés : les violences policières, la pédophilie, les réseaux sociaux, les addictions, les multinationales, les médias, les mouvements contestataires des années 60, la drogue, le mariage, l’immigration, le féminisme, la guerre, l’écologie, la malbouffe… Et bien sûr les relations mère-fils, père-fils, l’amitié, l’amour, la mort. On pourrait craindre qu’une telle multitude de sujets donne un résultat brouillé et confus, mais ce n’est pas le cas. Au contraire, tout s’imbrique avec logique. Et le tout porte un regard désabusé sur notre société.

C’est un roman intéressant, bien écrit, ironique et intelligent auquel on pourrait toutefois reprocher quelques longueurs. Pour un premier roman, c’est prometteur (souhaitons à Nathan Hill un destin différent de celui de son héros).  



Extraits :

«Si facile de partir. Qu'est-ce qui retenait les gens dans leur orbite quotidienne? Rien, comprenait-il à présent, pour la première fois. Il n'y avait rien qui empêche qui que ce soit de décider, un jour, de disparaître. » 


« Il arrive qu'on soit tellement enfermé dans sa propre histoire qu'on ne voit pas le second rôle qu'on occupe dans celle des autres. »


« Elle en avait conclu que quatre-vingt pour cent des convictions que nous avons à vingt ans s'avèrent erronées. Le problème est qu'on ne sait pas à quoi correspondent les vingt pour cent restant avant un très long moment. »


« Avant, Samuel annotait leurs copies — au stylo rouge, même. Il leur enseignait des subtilités de langage, la différence et les usages de « ceci » et « cela », « quand » et « lorsque », « car » et « parce que ». Toutes ces choses. Jusqu'au jour où, alors qu'il faisait le plein à la station-service la plus proche du campus, en levant la tête vers l'enseigne lumineuse — qui annonçait : Le pl1 en – de 2, c facil ! — il s'était figé et avait pensé : À quoi bon ? »


« Aujourd’hui commander un hamburger, c’est affirmer un choix politique. »

D'autres avis chez Jérôme, Kathel, Jostein, Eva, Fleur, Papillon