Par Ariane
Auteur :
Abby Geni
Titre :
Farallon Islands
Genre :
roman
Langue
d’origine : anglais (Etats-Unis)
Traducteur :
Céline Leroy
Editeur :
Actes Sud
Nombre de
pages : 384p
Date de
parution : juin 2017
Présentation de l’éditeur :
Miranda débarque sur les îles Farallon, archipel sauvage au
large de San Francisco livré aux caprices des vents et des migrations
saisonnières. Sur cette petite planète minérale et inhabitée, elle rejoint une
communauté récalcitrante de biologistes en observation, pour une année de
résidence de photographe. Sa spécialité : les paysages extrêmes. La voilà
servie.
Et si personne ici ne l’attend ni ne l’accueille, il faut bien pactiser avec
les rares humains déjà sur place, dans la promiscuité imposée de la seule
maison de l’île ; six obsessionnels taiseux et appliqués (plus un poulpe
domestique), chacun entièrement tendu vers l’objet de ses recherches.
Dans ce décor hyperactif, inamical et souverain, où Miranda n’est jamais qu’une
perturbation supplémentaire, se joue alors un huis clos à ciel ouvert où la
menace est partout, où l’homme et l’environnement se disputent le titre de pire
danger.
Avec une puissance d’évocation renversante et un sens profond de l’exploration
des âmes, Abby Geni nous plonge en immersion totale parmi les requins, les
baleines, les phoques, les oiseaux et les scientifiques passablement autistes…
dans un vertigineux suspense, entre thriller psychologique et expérience de
survie.
Mon avis :
Une couverture attirante, un résumé alléchant et un coup de cœur
de ma libraire, aucune hésitation !
Miranda est photographe, une baroudeuse qui passe sa vie à
voyager d’un pays à un autre pour photographier la nature et les animaux. Elle s’installe
pour une année sur les îles, un territoire sauvage et inhospitalier, refuge
protégé pour de nombreuses espèces marines, habité par un groupe de biologistes
aussi peu accueillants que les îles elles-mêmes.
C’est un roman assez riche, abordant autant le rapport de l’homme
à la nature que les rapports des hommes entre eux. Et si la vie dans les îles
est pour le moins précaire et spartiate, les relations humaines sont tout aussi
difficiles.
Miranda est un personnage attachant. Dernière arrivée sur
les îles, elle peine à s’intégrer à ce groupe de scientifiques unis par leur
passion commune. Dans ce groupe où la place de chacun est bien définie, Miranda
arrive comme un cheveu sur la soupe, bousculant les habitudes de tous. Et les
humains peuvent se révéler bien plus dangereux que les animaux.
Les six scientifiques de l’île vivent ensemble jour et nuit,
depuis parfois de très longues années, partageant leur espace, leur travail et
leurs moments de détente. Ils quittent rarement voire jamais les îles, Galen l’ancien
du groupe n’est pas retourné sur le continent depuis plus de dix ans. Pour
autant, leur unité n’est que de façade. Ils ne se connaissent pas vraiment les
uns les autres. Des solitudes côte à côte mais ne se rencontrant que rarement.
C’est également une très belle réflexion sur le deuil. Miranda
est portée par sa passion, elle n’a aucun lien, aucune attache. Elle a perdu sa
mère pendant son adolescence et ne se remet pas de cette perte. Depuis lors, elle
écrit à sa mère de longues lettres, dans lesquelles elle lui raconte tous les évènements
de sa vie. Des lettres qu’elle poste sans adresse, ou qu’elle abandonne en
pleine nature lorsqu’elle le peut. Son séjour sur les îles Farallon est l’occasion
pour elle de revenir sur cette perte et ses sentiments pour sa mère.
Et enfin il y a les îles elles-mêmes. Ces terres sauvages et
isolées, situées à seulement 50 kilomètres des côtes de San Francisco, mais
pourtant bien loin du quotidien du continent. Les scientifiques sont les seuls
humains des îles, peuplées de milliers d’oiseaux, de phoques, de requins et de
baleines. Que j’ai été émerveillée par ces animaux, bouleversée par la beauté
sauvage des îles, passionnée par le travail des biologistes ! Les
scientifiques ne doivent jamais interférer avec la nature même pour aider un
petit phoque séparé de sa mère ou soigner un animal blessé, leur quotidien est
rythmé par la vie autant que par la mort, c’est un monde âpre et dangereux,
la nature à l’état brut, magnifique et hostile.
Magnifique !
Je n’irai pas jusqu’au coup de cœur, mais c’est une très
belle lecture qui nous parle de deuil, de rédemption et de la force de la nature, et très prometteur pour une jeune auteur qui signe ici son
premier roman.
Extrait :
« L’archipel était la réponse à une question dont j’ignorais
que je la posais. C’était le foyer que je n’avais pas connu et que je cherchais
depuis tout ce temps. »
« Ta mort m’a appris ce qui arrive après l’amour. Ça ne
m’intéresse pas de vivre à nouveau une aussi grande perte. Alors je suis
partie, toujours plus loin. Je suis arrivée ici. »
« La force de mon propre élan m'a surprise. Je voulais avoir le petit près de moi, le prendre dans mes bras. La solitude de cette jeune créature était insupportable. Je ne savais pas si je pleurais. Cela pouvait aussi bien être la pluie froide sur mes joues. Mick a tenu bon, ne m'a pas lâchée. Nous avons regardé le bébé poursuivre son chemin vers l'intérieur des terres, se démener à travers la brume, poussant des cris que personne n'entendait, jusqu'à ce que l'air vaporeux l'engloutisse. »