mardi 8 janvier 2019

A la grâce des hommes - Hannah Kent

Par Ariane

Autrice : Hannah Kent
Titre : A la grâce des hommes
Genre : roman
Langue d’origine : anglais (Australie)
Traductrice : Karine Reignier-Guerre
Editeur : Presses de la cité
Nombre de pages : 400p
Date de parution : mai 2014

Présentation de l’éditeur :
Agnes Magnúsdóttir, servante dans l’Islande austère et violente du XIXe siècle, est condamnée à mort pour l’assassinat de son amant et placée dans une ferme reculée en attendant son exécution. Horrifiés à l’idée d’héberger une meurtrière, le fermier, sa femme et leurs deux filles évitent tout contact avec Agnes, qui leur inspire autant de peur que de dégoût. Seul Tóti, le révérend chargé de préparer la jeune femme à sa fin prochaine, tente de la comprendre. Au fil des mois, Agnes raconte sa vérité, aussi terrible soit-elle à accepter. Mais la justice des hommes est en marche, et pourquoi Agnes réapprendrait-elle à vivre si c’est pour mourir ?

Mon avis :
Pour son premier roman, l’australienne Hannah Kent s’est intéressée à l’histoire d’Agnes Magnusdottir, la dernière femme condamnée à mort et exécutée en Islande. Ce cas célèbre en Islande a apparemment fait couler beaucoup d’encre, mais dans la plupart des écrits, Agnes est présentée comme une femme froide et manipulatrice. Hannah Kent a voulu offrir un portrait plus humain de cette femme. Elle a donc fait le choix de nous présenter une femme vulnérable et sensible, victime de sa condition.
Agnes raconte son histoire à Toti, le pasteur chargé de la préparer à la mort, sous le regard haineux puis apitoyé des fermiers qui en ont la garde. En attendant son exécution, Agnes vit au milieu d’eux, chargée des tâches habituelles d’une servante. Et c’est ainsi que l’on découvre le quotidien d’une ferme islandaise au début du XIXème siècle. Une vie de labeur incessant, où maîtres et serviteurs partagent l’espace commun de la badstofa, où la vie est morne et difficile, le froid, la misère et la mort n’étant jamais bien loin.
Les confidences d’Agnes sont interrompues par des passages consacrés à d’autres personnages, notamment le pasteur Toti et la fermière Margret. Et des lettres, poèmes et extraits d’actes judiciaires, précédent chaque nouveau chapitre. L’apport de ces documents est particulièrement intéressant.
J’ai toutefois un bémol. En effet, le parti pris d’Hannah Kent pour Agnes est trop présent. Et cela devient dérangeant lorsqu’Agnes en arrive à parler de Natan et Pétur, les victimes du meurtre et lorsqu’elle raconte le crime en lui-même.
L’écriture d’Hannah Kent est agréable et fluide, le ton est rythmé et l’histoire est intéressante. Bref, j’ai passé un bon moment de lecture avec ce roman. Hannah Kent a depuis écrit un autre roman pour lequel les critiques sont aussi bonnes. Par ailleurs, j’ai cru voir que ce roman sera bientôt adapté au cinéma avec l’actrice Jennifer Lawrence dans le rôle d’Agnes Magnusdottir. Et là j’avoue que j’ai quelques craintes avec une adaptation à l’américaine. 

Extrait :
« C'est alors que je les ai vus : une petite assemblée d'hommes et de femmes se tenait là, immobile, les yeux rivés sur moi. J'ai mis un moment à comprendre ce qu'ils faisaient. Car ce n'était pas moi qu'ils regardaient. Pas moi qu'ils voyaient. J'étais deux hommes morts. J'étais une ferme en feu. J'étais le couteau. J'étais le sang. »

« Pendant le procès, ils ont picoré mes mots comme une nuée d'oiseaux. D'affreux oiseaux, vêtus de rouge et boutonnés d'argent. Têtes penchées, bec serrés, ils fouillaient mon âme en quête des baies rouges de la culpabilité. Ils ne m'ont pas laissé raconter les événements à ma façon : Ils se sont emparés de mes souvenirs de Natan, de mes images d'Illugastadir, et les ont distordus jusqu'à les rendre méconnaissables. Ils m'ont arraché une déposition qui faisait de moi une femme vile et malveillante. Tout ce que j'ai dit m'a été volé ; tous mes mots ont été altérés jusqu'à ce que cette histoire ne soit plus mienne. »

« C'est injuste. Les gens prétendent vous connaître sous prétexte qu'ils savent ce que vous avez fait, mais ont-ils pris la peine d'écouter ce que vous avez à dire? Bien sûr que non! Dans cette vallée, vous aurez beau vous démener pour vivre en bon chrétien, si vous commettez une erreur, elle ne vous sera jamais pardonnée. Même si vous avez opté pour ce qui semblait être la meilleure solution. Même si une voix s'écrie au plus profond de vous-même "Je ne suis pas celui que vous croyez!" Seule compte l'opinion que les gens ont de vous. Elle définit qui vous êtes. »

7 commentaires:

  1. Une adaptation d'un tel roman par des américains ? Pourvu qu'ils n'y mêlent pas de supers héros pour faire des entrées....

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    1. Quand même pas ! Mais je sens bien le mélo au romantisme dégoulinant.

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  2. Un beau livre qui m'avait bien plu. Je n'ai pas voulu voir Serena au cinéma, je n'irai pas voir non plus l'adaptation de celui-ci.

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  3. J'avais aussi aimé Serena mais je n'ai pas vu l'adaptation, les critiques que j'ai lues n'étaient pas tendres. Le roman âpre de Ron Rash transformé en bluette romantique !

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  4. J'ai énormément aimé ce roman ; je n'irai pas voir une adaptation ciné.

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